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Marthe Boileau : l’œuvre de toute une vie

VICKY CHARBONNEAU vicky.charbonneau@eap.on.ca

En cent ans, Marthe Boileau a sans aucun doute touché la vie de plus de gens qu’elle ne veut bien le réaliser. Après une longue carrière de 42 ans dans l’enseignement, elle s’est consacrée au bénévolat en donnant son temps à sa chère paroisse, la paroisse Sacré-Cœur de Bourget. Quatrième d’une famille de neuf enfants, Marthe Boileau est née le 23 décembre 1916. Après avoir terminé ses études à Bourget et à Plantagenet, elle quitte sa résidence de la rue principale pour aller étudier à Ottawa. Sortie de l’école normale, elle devient enseignante après une année d’université. « Je n’étais pas bien vieille. Je n’avais pas 19 ans », s’est-elle rappelé au sujet de son premier poste à Bourget, à l’ école du trois . « J’avais tous les élèves de la 1 re à la 8 e année. Je les avais tous ensemble puis je gagnais 300 piastres par année. Mais ça ne me faisait rien. » Après cinq ans à développer sa confiance, Marthe était prête à relever de nouveaux défis et s’est rendue à Espanola, près de Sudbury. « Quand je suis arrivée, c’était un militaire qui était directeur. Quand il m’a vue, il m’a dit : toi, tu vas prendre ma place. » Ce qu’elle a fait lorsque ce dernier a été appelé à servir son pays. Marthe a été promue à directrice du secteur français. Justement, lors de la Seconde Guerre mondiale, Espanola est devenu un camp pour les prisonniers de guerre allemands, de 1940 à 1943. « Eux autres (les Allemands), ils voulaient se sauver, alors ils s’étaient cachés en dessous de l’hôtel. Là, les chats miaulaient parce qu’ils les entendaient. Donc, les cuisiniers sont descendus en bas puis ils ont découvert les tunnels. Moi jeme souviens, on voyait les policiers militaires courir après ces mauvais soldats-là. » Après Espanola, elle s’est retrouvée à Cor- nwall pendant cinq ans, jusqu’à ce qu’un inspecteur d’école la convainque de le suivre à Ottawa, où elle a commencé à enseigner dans une école pour filles. Après quelque temps, on lui offrait le poste de conseillère pédagogique du conseil scolaire d’Ottawa, poste qu’elle a occupé jusqu’à sa retraite. C’est dans la soixantaine qu’elle retourne à Bourget, mais ça n’allait pas pour autant empêcher Marthe de continuer à exercer sa bienveillance. En fait, dans ses temps libres, elle s’est vite tournée vers le bénévolat, qui l’occupait à un point tel qu’elle ne disposait désormais que de deux jours de congé par semaine. Parmi ses tâches, elle faisait leménage de l’église et du presbytère, ainsi que des tâches de secrétariat. « Je montais même sur les bancs pour épousseter. Tout le monde me disait monte pas là, mais c’est mon église, fallait que je la nettoie. » Le jeudi, elle pouvait être caissière au Par- tage, un organisme similaire à un comptoir populaire et un autre jour, elle allait chercher des personnes de la résidence pour les faire chanter, jouer au bingo ou leur donner la communion. « Elle les appelait ses p’tits vieux même s’ils étaient tous plus jeunes qu’elle », a lancé son neveu Jean-Jacques, avec qui elle a aussi siégé au Comité des affaires temporelles (CAT) pendant plusieurs années.

Marthe Boileau recently celebrated her 100 th birthday with her friends and family, at Résidence St-Mathieu in Hammond. This Bourget resident mainly dedicated her life teaching and giving her time to people in need and to her parish. —photo Vicky Charbonneau

N’ayant jamais eu d’enfants elle-même, elle trouvait le temps pour en aider plu- sieurs, dont de nouveaux arrivants qui ne parlaient pas français. « Devon et Agatha, ils sont allés à l’université ces deux-là ! », a-t-elle dit fièrement. Pour souligner ses réalisations excep- tionnelles, en 2011, elle a reçu le Prix de l’Excellence de l’Ontario pour les personnes âgées, une haute distinction qui lui a été décernée lors d’une cérémonie à Toronto en présence du gouverneur général. Marthe n’a jamais vraiment arrêté jusqu’à

l’âge de 97 ans, où elle était encore capable de conduire et de prendre soin de sa mai- son. Depuis, sa condition physique fait en sorte qu’elle est moins autonome, mais sa détermination ne s’est jamais éteinte. En fait, même après un faible ACV en juillet passé, elle a persévéré : « Ils lui ont dit qu’elle ne pourrait plus parler, mais elle a travaillé fort et elle a tout réappris ses mots. Il faut le faire ! », a confié sa nièce Monique. Marthe a toujours été une enseignante dans l’âme : « Si on faisait des erreurs, elle nous corrigeait avec son doigt, qui se pro-

mène encore aujourd’hui », ont déclaréMo- nique et Jean-Jacques. À ce moment-là, les trois s’unissent d’un ton moqueur, « Cache ton doigt demaîtresse d’école ! », en éclatant de rire. « Restez tranquille », a ajoutéMarthe en les montrant du doigt. Le secret de sa longévité : « Le sucre », a-t-elle répondu avec un sourire en coin. C’est le vendredi 23 décembre que sa famille, ses amis ainsi que d’anciens élèves ont souligné son siècle d’existence lors d’une grosse fête en son honneur à la résidence St-Mathieu.

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