FNH N° 1102 Full

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ECONOMIE

FINANCES NEWS HEBDO

VENDREDI 31 MARS 2023

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Kh. K. : Un bilan qui consiste à communiquer que le nombre d’enregistrement des bénéfi- ciaires est de plus de 130.000 individus repré- sente un chiffre dans un bilan. Le ministère de tutelle aurait pu nous fournir plus d’informa- tions sous formes d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs de ce programme qui aurait coûté 2,5 milliards de dirhams. Aussi, Sa Majesté le Roi, dans un discours en 2017, avait affirmé : «À l’instar de l’Initiative nationale pour le déve-

loppement humain, Nous appelons à l’élaboration d’une nouvelle poli- tique intégrée dédiée aux jeunes». De plus, l’Organisation interna- tionale du travail (OIT) considère que les emplois décents – et pas n’importe quels emplois – sont essentiels pour parvenir à la paix,

Le projet «Awrach» a été conçu pour promouvoir l’emploi chez les personnes sans diplômes.

la justice sociale, l'inclusion sociale, le déve- loppement économique et l’épanouissement personnel. Par ailleurs, la déclaration univer- selle des droits de l’Homme considère que « toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage ». De telles déclarations permettent de mieux cerner la problématique du droit à l’emploi. Or, l’esprit du programme Awrach est tout à fait en contradiction avec ces déclarations. Il s’agit d’un programme qui renverrait les jeunes vers le chômage et l’insé- curité sociale après 6 mois de travail. F.N.H. : Une circulaire pour la mise en œuvre du programme «Awrach 2» a été définie par le gouvernement pour atteindre l’objectif de 250.000 emplois durant la période 2022-2023. Lors de cette 2 ème phase, deux volets ont été proposés, les chantiers géné- raux provisoires et celui du soutien de l’insertion durable. Quelle est votre lecture en ce qui concerne ces deux composantes ? Kh. K. : Le gouvernement, à travers l’objectif de création de 250.000 emplois durant la période 2022-2023, cherche à tenir ses promesses en matière de création d’emploi. Il avait promis la création d’un million de postes durant la légis- lature. Awrach 1 et Awrach 2 sont deux pro- grammes qui visent la création de nouveaux postes. Or, le gouvernement se heurte à une réalité compliquée du marché de l’emploi au Maroc. En effet, les chiffres fournis par le HCP évoquent une destruction de 24.000 postes en 2022 au moment où 15 millions de jeunes, en âge d’activité, sur une population de 27,5 millions demeurent exclus du marché du travail avec un taux d’activité de 44% uniquement, alors que 400.000 jeunes arrivent sur le marché

nement actuel a multiplié les projets destinés à l’emploi des jeunes, que ce soit dans l’entrepre- neuriat, à travers le lancement du programme Forsa, ou dans le salariat, à travers le lance- ment du programme Awrach. Comme pour tout projet, l’objectif est d’assurer sa réussite. A cet effet, on peut légitimement s’interroger si les associations disposent des compétences suffisantes pour appliquer le dispositif prévu dans ce programme en matière de formation et d’accompagnement des bénéficiaires ainsi qu’en matière de gestion de l’administration des ressources humaines. Ont-ils les moyens humains suffisants et matériels, notamment informatiques, pour pouvoir gérer les dossiers de tous les bénéficiaires qui se comptent par centaines dans certaines associations ? Là est tout l’enjeu. Toutefois, la région pourrait jouer un rôle très important en orientant le programme vers les besoins en emploi durable en faveur de ses territoires. A mon avis, le projet Awrach devra s’étaler sur une période de 3 ans minimum dans les secteurs publics demandant plus d’assistance pour garantir un meilleur service public et vers le secteur non marchand, en sus d’ouvrir droit à une formation qualifiante en alter- nance. En parallèle, l’État pourra soutenir par des mesures d'aides fiscales et sociales les entreprises qui choisissent de recruter cette catégorie de jeunes après ces 3 ans. De plus, l'Etat est tenu de lancer des concours pour ces derniers afin d’intégrer la fonction publique. De telles mesures permettront à l'Etat de réaliser ses objectifs en matière de création d'emplois et garantir aux jeunes un emploi décent et durable. ◆

de l’emploi chaque année. Par conséquent, proposer des programmes précaires pour les jeunes, tels que Awrach, risquent d’amplifier la situation d’emploi et de faire éclater une crise sociale dans le futur. F.N.H. : 70% des bénéficiaires du programme ne disposent pas de diplômes. Pourquoi cette particularité selon vous ? Kh. K. : En temps de récession, le diplôme reste un atout efficace pour trouver un emploi. Toutefois, le taux de décrochage scolaire a atteint des niveaux inquiétants au Maroc. Cette catégorie d’élèves et d’étudiants qui aban- donnent l’école ou l’université sans diplôme, qu’on appelle «Neet» (Nor in education, employment, or training) c’est-à-dire qu’ils ne sont ni à l’école, ni en formation, ni en emploi, sont particulièrement vulnérables. Selon le HCP, ils sont 1,5 million, soit 25% chez les jeunes entre 15 ans et 24 ans. Pour ces jeunes, décrocher un emploi et sortir de la précarité est de plus en plus difficile. Le même rapport souligne que plus de la moitié des jeunes en activité (51,1%) n’ont aucun diplôme. Dans ce contexte, le projet «Awrach», qui a été conçu pour promouvoir l’emploi chez cette population sans diplômes, en plus de ceux qui avaient perdu leurs postes à cause de la crise sanitaire, devra créer des opportunités d’em- ploi pour absorber une partie des chômeurs chez cette catégorie. F.N.H. : Que faut-il améliorer dans le programme «Awrach» pour qu’il soit plus attractif et plus étendu ? Kh. K. : Pour remédier au chômage, le gouver-

Awrach ne résoudra pas le problème de fond, puisqu’il renvoie les bénéficiaires au chômage après 6 mois de travail.

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