Finances News Hebdo N° 1065

14

BOURSE & FINANCES

JEUDI 12 MAI 2022 FINANCES NEWS HEBDO

www.fnh.ma

La FED durcit le ton C hose promise, chose due. La FED poursuit son resserrement monétaire, qui n’en est qu’à ses débuts. Elle a augmenté son taux directeur d’une four- Par Omar Fassal *

d’amener le taux directeur vers cette plage d’ici la fin de l’année. Conséquence immédiate, le Dollar s’est beaucoup renforcé. Il a gagné 8% depuis le début de l’année face aux autres devises, et surtout, il atteint un plus haut de 20 ans face à un panier composé des principales devises internationales. Face au Dirham marocain, il atteint désormais 10,01, en progression de +7,8% depuis le début de l’année. Malgré tous les efforts de la FED, l’inflation qui atteint actuellement 7,6% en 2022 ne bais- sera qu’en 2023 à 2,8%. Ce niveau est supérieur aux 2% que visent d’habitude les grandes Banques centrales, mais la FED a modifié son objectif. Comme l’inflation a été plus basse pendant un certain temps à son objectif de 2%, elle s’autorise dorénavant à ce que l’inflation dépasse momentanément les 2%, pour compenser le retard cumulé. En d’autres mots, elle s’intéresse maintenant à la moyenne, plutôt qu’à l’arrêté de fin de mois. Du côté des autres principales Banques centrales, plusieurs dynamiques sont observées. La Banque d’Angleterre suit de près le resserrement américain. La Banque centrale a annoncé un relè- vement de 25 points de base de son taux directeur à 1%, le niveau le plus élevé depuis 2009. Par contre, la Banque d’Angleterre est plus pessimiste dans ses déclarations. Contrairement à la FED qui assure que son resserrement n’aura pas d’impact sur l’activité, en Angleterre, Andrew Bailey, le Gouverneur de la Banque centrale admet qu’il y aura un ralentissement certain. L’inflation continuera d’augmenter tout au long de l’année pour toucher près de 10% en fin d’année en raison des prix de l’énergie. Cela devrait faire basculer l’économie britannique en récession au quatrième trimestre de l’année. Ensuite, au niveau de la Banque cen- trale européenne, on observe une accé- lération. Initialement, elle ne comptait durcir sa politique monétaire qu’à la fin de l’année au mois de décembre. Deux principales justifications à cela. D’abord, la moitié de l’inflation observée en Europe est due à la hausse des prix de l’énergie. Du coup, la BCE prévoit

chette de 0,25-0,50% vers 0,75-1,0%. Deux précédents suite à cette hausse, qui permettent de prendre conscience du changement majeur qu’opère actuel- lement la FED. D’abord, c’est la première fois depuis 2000 (période des excès financiers de la bulle Internet), que la FED augmente son taux directeur non pas de 25 points de base, mais de 50. Ensuite, c’est la première fois depuis 2006 qu'elle augmente son taux directeur pour la deuxième réunion successive. En effet, la FED avait déjà augmenté son taux lors de la réunion de mars. Elle suit donc le chemin qu’elle avait annoncé, et qui consistera à augmenter son taux directeur lors de chacune des réunions prévues cette année. Il en reste encore cinq : juin, juillet, septembre, novembre et décembre. Les prévisions du marché anticipent un taux directeur entre 2,5% et 2,75% d’ici la fin de l’année 2022. Non seulement la FED compte pour- suivre ses hausses du taux directeur, mais elle souhaite également réduire la taille de son bilan. Comment ? Elle dis- pose d’un encours de titres financiers qu’elle avait acheté pour injecter des liquidités, principalement des bons du Trésor, et des obligations émises par les agences gouvernementales de titrisa- tion des prêts immobiliers (Freddie Mac, Fannie Mae, Ginnie Mae). Lorsque ces titres arrivent à maturité, la FED reçoit un remboursement de la part de l’émetteur. Ce remboursement correspond à une destruction monétaire sur son bilan. Pour conserver la même quantité de monnaie en circulation, elle doit réinvestir ces capitaux remboursés. Si elle ne le fait pas, cela correspondra à une ponction définitive de liquidités. C’est ce qu’elle compte faire : ne pas réinvestir les rem- boursements qu’elle reçoit. Elle compte ainsi réduire son bilan de 30 milliards de dollars par mois de bons du Trésor, et de 17,5 milliards d’obligations immobilières titrisées (Mortgage Backed Securities ou

MBS). Trois mois plus tard, elle compte rehausser ces plafonds : 60 milliards pour les bons du Trésor et 35 milliards pour les MBS. Si jamais la quantité de titres arrivant à maturité ne lui permet pas de ponctionner les objectifs de liqui- dité qu’elle vise, elle ne se contentera plus d’attendre que les titres arrivent à maturité; elle ira de l’avant en vendant ces titres aux acteurs du marché des capitaux. Les flux reçus après la vente correspondront à une destruction moné- taire. Vraisemblablement, c’est ce qui arrivera, car les MBS ont des maturités très longues : il n’y en aura pas suffisam- ment qui arrivent à maturité sur les mois à venir. La FED durcit sa politique monétaire pour réussir à maîtriser l’inflation, même si elle reconnait tout de même qu’une grande partie de celle-ci provient de l’inflation importée, en raison des ruptures sur les chaînes d’approvisionnement mondiales provenant des confinements de villes industrielles majeures en Chine, et de la guerre entre l’Ukraine et la Russie. La crainte, c’est que le resserrement de la FED ne ralentisse trop fortement la conjoncture économique. Elle rassure en expliquant que, selon elle, le taux neutre - qui ne provoque ni ralentissement ni accélération de l’activité économique - se situerait quelque part entre 2% et 3% : on en est encore loin. Le but est

Le renché- rissement du Dollar aura un impact sur notre facture énergétique libellée dans cette monnaie, et sera en par- tie compensé par les ventes de phosphates libellées éga- lement en Dollar.

Made with FlippingBook flipbook maker