Finances News Hebdo N° 1067

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ECONOMIE

FINANCES NEWS HEBDO

MARDI 31 MAI 2022

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F.N.H. : Le digital est-il devenu une nécessité aujourd’hui pour mettre en avant le concept d’ESS ? F. T. M. : Effectivement, le digital est une nécessité indiscutable. Le Réfam Dar Maalma a toujours initié de nombreuses expériences dans ce sens, notamment les

ateliers d’alphabétisation digi- tale en faveur de nos membres. Le digital permet aussi de faire connaître le savoir-faire, de nouer des contacts. Cela attire de nouveaux clients et, petit à petit, on s’ouvre sur de nou- veaux marchés… Le monde du

Les femmes artisanes pourraient être un levier important de développement natio- nal, régional et local…

numérique révolutionne tout, il faut donc être à la page et suivre l’ère de la tech- nologie. F.N.H. : À l’heure actuelle, quelles sont les implications de l'autono- misation économique des femmes sur le développement local ? F. T. M. : L’implication est évidente. Par son autonomisation, la femme change totalement d’horizon, d’objectifs. Elle devient un acteur économique et son apport se ressent aussi bien sur elle en tant qu’individu qu’en tant que membre d’une famille, d’un village, d’un pays. Nous avons une richesse incroyable déte- nue par les femmes artisanes. L’artisanat des femmes marocaines est non seu- lement apprécié, il est riche, varié et sa créativité n’a de limite que l’état d’esprit des femmes. C’est un potentiel énorme non encore exploité efficacement. Les femmes artisanes sont plus de 3 millions. Elles se trouvent dans les endroits les plus reculés, notamment dans les zones mon- tagneuses, les plaines, les côtes atlan- tiques et méditerranéennes, dans les fins fonds des oasis du Sahara. Elles brodent, tissent, perlent, fabriquent des ustensiles de poterie, des bijoux à partir de matières premières naturelles, inventent et laissent libre cours à leur imagination. Ce ne sont pas des petites mains, expres- sion fort réductrice des savoirs immenses détenus par elles, mais bel et bien de grandes mains, avec une fabuleuse dex- térité. Elles sont dignes et détiennent leur capital au bout de leurs doigts. Elles pourraient être un levier important de développement national, régional et local; un écosystème favorable ferait d’elles une vraie source et un gisement d’emplois et de richesses. Leur implication adéquate est un facteur efficace et irréversible de lutte contre la pauvreté. ◆

F.N.H. : En 2008, vous avez créé le réseau des femmes artisanes du Maroc Réfam, «Dar Maalma», afin de renforcer les capacités et les droits économiques des femmes, principalement celles qui travaillent dans l’artisanat. Parlez-nous de cette expérience et de son apport ? F. T. M. : En me posant cette question, vous touchez ma fibre sensible. Le Réfam Dar Maalma que nous avons eu le privilège de lancer le 30 mai 2008 à Marrakech sous la présidence effective de Son Altesse Royale la Princesse Lalla Meriem, a pour objectif principal le renforcement des capa- cités économiques des femmes artisanes. Le savoir traditionnel que ces femmes exceptionnelles et nombreuses détiennent, est appréhendé dans le cadre du Réfam Dar Maalma en tant qu’outil économique à optimiser pour améliorer la situation sociale et économique de ces femmes. Nous avons ainsi encadré plus de 5.000 femmes dans les douze régions du Royaume. Mais aucun développement ne saurait donner de résul- tat sans un cadre juridique harmonieux et inversement. Le Réfam a complété son action en défendant les droits des femmes, d’abord artisanes et, par ricochet, les femmes tout simplement. Nous sommes l’une des rares associations qui mène ce double combat : renforcement économique et renforcement du droit. Le Maroc béné- ficie d’un arsenal juridique impressionnant en faveur de l’amélioration de la condition de la femme, qui a connu dans sa globalité des progrès assez significatifs. Plus encore,

le pays a en général enregistré durant les vingt ans de règne de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, des avancées majeures au niveau des cadres normatif, institutionnel et législatif relatifs à la protection et à la promotion des droits de l’Homme et des droits humains des femmes. La réforme du statut de la famille, qui est entrée en vigueur en février 2003, a marqué un tour- nant historique dans la législation maro- caine en matière de droits des femmes. La Constitution adoptée le 1 er juillet 2011 a consacré la reconnaissance du principe de l’égalité entre les femmes et les hommes et l’engagement de le respecter. Cette consé- cration de l'égalité entre les hommes et les femmes est relevée sans ambiguïté par l’article 19 de la Constitution. Maintenant, nous sommes appelés à mettre à profit tous ces acquis à travers la sensibilisation, l’alphabétisation juridique et l’éducation. Le droit et le respect des femmes devraient être un construit social. Le Réfam Dar Maalma mène son activité à travers un nombre important d’actions telles que «Dar Maalma Expo» qui en est à sa 12 ème édition, l’organisation du Congrès des femmes artisanes africaines, 4 édi- tions du Caftan Dar Maalma, Peace Table autour des droits des femmes, à savoir Nissae bidaouiates et Nissae maghribiates, le showroom permanent Dar Maalma à Marrakech, sans oublier les différents cycles de formation et les nombreuses actions de visibilité des femmes artisanes (publication de livres ou encore partenariat avec les journalistes…).

Dans la situa- tion de l’ESS, nous avons deux facteurs à développer conjointe- ment : la performance écono-

mique et la contrainte sociale.

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