Le Dictionnaire Encyclopédique de la Psychanalyse

Retour vers le menu

l'imbrication inéluctable du sujet dans les projections de l'autre. Elle a précisé que l'injonction de « dire tout ce qui vient à l'esprit » peut avoir l'effet de mettre le patient dans un état d'esclavage absolu, qui le transforme en un robot parlant. Dans ce cas et d'autres, elle a analysé l'aliénation potentielle perpétuée par l'application irréfléchie du cadre. Dans son concept de l'inévitable « violence de l'interprétation », elle a situé la personne soignante et l'analyste dans la même position paradoxale du risque d'interprétation ‘excessive’, une mise en garde qui a conduit les analystes francophones des deux côtés de l'Atlantique à exprimer des réserves au sujet de l'utilisation inconsidérée du contre-transfert pour comprendre les patients. Les auteurs francophones ont été particulièrement sensibles à l'inhérent potentiel ‘séducteur’, à la fois nécessaire et abusif, qui fait partie intégrante du cadre analytique. Donnet (2001) fait la différence entre le site analytique et la situation analysante : « le site analytique contient l'ensemble de ce qui constitue l'offre d'une analyse. Il inclut l’analyste en fonction et la situation analysante résulte, aléatoirement, de la rencontre suffisamment adéquate du patient et du site 18 . » (p.138). Les sources principales relatives à la théorisation actuelle sur le cadre sont Winnicott (1956) et Bleger (1967). Certains auteurs se reportent aussi sur la théorie du champ des Baranger (1983), qui considèrent que la situation analytique est une co- création (à deux) ; les deux membres de la paire analytique intimement liés, aucun d'entre eux ne pouvant être compris l'un sans l'autre. Le champ analytique est configuré comme un fantasme inconscient du couple analytique et sera ainsi considéré tout au long de l'analyse. L'article fondateur de André Green, “The Analyst, Symbolisation, and Absence in the Analytic Setting (1975) (« L'analyste, la symbolisation et l'absence dans le cadre analytique », 1974) 19 a été dédié à la mémoire de Winnicott, qu'il a fait connaître en France. Selon la lecture que Green fait de Winnicott, le cadre, et la qualité de la présence analytique qui l'accompagne, est fait de ‘l'environnement’ du jour présent, dans son rôle facilitateur ou d'empiètement, sur la capacité du patient à l'espace transitionnel et à la pensée créative. La pensée est ici signifiée dans son sens non-hallucinatoire, les pensées non-projectives subjectivées, faisant partie de soi. Dans un prolongement de son ouverture théorique, le travail de René Roussillon a mis l'accent sur la qualité des ‘gribouillis : le cadre peut devenir une invitation à ce que le patient participe à une zone/champ de jeu, ou de co-pensée, partagés, où le patient peut ‘réagir’ de sa propre manière (Roussillon, 1995) et qui auront pour conséquence d'être soit ‘tenu’ par l'analyste, ou interprété. L'analyste et son cadre deviennent un ‘médium malléable’ dans son sens de ‘l'utilisation de l'objet’ (1988, 1997, 2013).

18 NdT : In: « De la règle fondamentale à la situation analysante ». Revue française de psychanalyse 2001/1 (Vol. 65) 19 NdT :, in « La nouvelle revue de psychanalyse », 1974, n°10 et dans la « RFP », 1974, n°6.

26

Made with FlippingBook - Online Brochure Maker