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Kernberg (2015) souligne la complexité dynamique des premières semaines et des premiers mois de la vie. Il précise que dès la « phase symbiotique » sans limite (Mahler, Pine et Bergman 1975), où l'infans et la mère sont une « unité opératoire », les aspirations précoces à la différentiation du self , et les rudiments de l'empathie, émergent en prérequis à une « théorie de l'esprit » (Gergely et Unoka, 2011 ; Kernberg 2015). La version kernbergienne de la théorie psychanalytique des relations d'objet (1982, 2004, 2015) relie les niveaux du développement de la structure psychique à l'organisation de la personnalité et à la psychopathologie. Il reconnait les deux niveaux élémentaires de l'organisation de la personnalité ( borderline et névrosée) qui sous-entendent les deux niveaux élémentaires du développement, à la suite du niveau initial du manque de différenciation et de l'effacement des frontières du self et de l'objet (psychose). Menant plus loin les recherches de Jacobson et de Mahler en y intégrant de manière sélective certains aspects de la pensée kleinienne, Kernberg considère que l'enfant préverbal construit une structure duelle de la psyché, sous la dominance « d'états d'affect extrêmes » ( peak affect states ). Des représentations de soi idéalisées liées à un objet idéalisé, dominées par des affects positifs, sont mis en opposition à des représentations négatives de soi et d’objet où des affects agressifs et frustrés s'imposent. Dans ces conditions, aucune vision intégrée du self ou de l’objet n’existe. Le self et l'objet sont plutôt clivés ou dissociés dans des représentations d'objet partiel idéalisé ou persécutoire. Si les interactions mère-enfant sont dominées par des affects agressifs, l'intégration nécessaire à l'identité du Moi ( ego identity ) est empêchée entrainant des troubles de la personnalité limite ( borderline ). En ce qui concerne le narcissisme, spécifiquement, l'investissement est situé dans une « structure pathologique du self » (le « self grandiose »), contenant des représentations de « soi réel » ( real self ), de soi idéal et d’objet idéal. Cependant, si lors des trois premières années de la vie, les conditions développementales permettent la tolérance de l’ambivalence, des relations émotionnelles à la fois négatives et positives avec les mêmes objets externes, l'enfant peut développer un sentiment de soi intégré (le « soi normal » [normal self ], un concept de soi réaliste) et la capacité d'une vision intégrée de la personne significative ( significant other ). Dans ce cas, la concrétisation de la constance de soi et de l’objet permet la formation de l'identité du Moi. La structuration interne qui en résulte délimite le Ça et engendre un Moi capable de fonctions sublimatoires permettant l'expression adaptée de besoins émotionnels en ce qui concerne la sexualité, la dépendance, l'autonomie et l'affirmation de soi agressive/affirmée. Les relations d'objet internalisées qui comprennent des exigences et interdits d'origine éthique, transmises lors des premières interactions de l'infans dans son contexte psychosocial, sont intégrés dans le Surmoi. Ce niveau d'organisation de la personnalité mieux intégrée (névrosé, « normal ») permet les conflits inter-systémiques intrapsychiques entre les trois agences du Ça, du Moi et du Surmoi (conflit pulsion-défense). Ici, le mode prédominant de défense est le refoulement. L'élaboration intégrative récente de Kernberg au sujet de la théorie de la relation d'objet comporte de nombreuses implications pour aborder la complexité du développement précoce et des pathologies du self qui en résultent, où il propose un « proto- self ' » homéostatique qui
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