Le Dictionnaire Encyclopédique de la Psychanalyse

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Selon la position de Harris (2005), les psychanalystes postmodernes ambitionnent de réaliser une vision particulière du paradoxe ou du conflit dans laquelle un certain nombre d'aspects du ‘self’ peuvent coexister : celui du guérisseur, du policier psychanalytique, du sujet et de l'objet de la théorie et celui qui est le sujet de, ou assujetti à, des cultures particulières, sous-groupes et familles. Du point de vue des différentes perspectives théoriques, le conflit (intersubjectif, intrapsychique et énacté) est associé au processus même du changement. Le conflit est un aspect inhérent du mouvement développemental, et à ce titre les mouvements (macro ou micro) sont chargés de fortes expériences de déséquilibre. Le changement lui-même est un état conflictuel potentiellement complexe, multidirectionnel et instable. Les conflits qui émergent dans des conditions de transformations relationnelles ou psychiques sont produits par de nombreux états d'affect différents et de pics relationnels. Une idée centrale propose qu'un sujet dans un état de conflit se sente pris par deux ‘quêtes’ impossibles (Apprey, 2015). La croissance implique la séparation et la séparation vis- à-vis d'objets morts ou mourants peut être intolérable. Ainsi, le changement se situerait à la croisée d'un conflit par rapport à des épreuves psychiques et à la liberté mentale où un pic dangereux de lutte et même d'impasse est engendré. Que ce soit un précipice, ou la limite du chaos, ou bien un dramatique parcours de séparation effrayante pour certains, et peut être d'une manière ou d'une autre par tous les patients, c'est un point de conflit et de danger ultime. Cela pourrait correspondre à des hauts et des bas de progrès au cours d'une analyse, et à des revirements et paniques lorsque des altérations psychiques se déclenchent ou se concrétisent. Le concept du champ analytique d'un processus en spirale de Willy et Madeleine Baranger (2006, 2009a, b) et les notions de catastrophe et de transformation de Bion représentent des racines importantes pour les approches relationnelles. La catastrophe du changement (Goldberg, 2008) et les formes de mouvement et de changement psychiques représentent tous deux un terrain de deuil et d'impasses dans le travail de deuil. Ces idées se connectent à un ensemble puissant de concepts, qui ont été développés par J. Henri Rey. Dans son article « That which Patients Bring to Analysis 34 » (Rey, 1988), Rey soutient l'idée que les patients se présentent avec des intentions cachées – une mission comme le dirait Apprey (2015) – qui serait de réparer les objets détériorés de leur histoire et qui font partie désormais d'un monde interne mourant ou détérioré, donc : guéris l'objet (de fantasme interne) et là le patient pourra changer. C'est une contrainte conflictuelle impossible dans laquelle de nombreux traitements se déroulent. Dans l'esprit de la théorisation relationnelle au sujet du rôle véritable du contretransfert et de la subjectivité de l'analyste, l'on pourrait adopter le regard de Reys sur la tâche inconsciente de l'analyste. En abordant la question de résistance et de l'angoisse vis-à-vis du changement et la détermination tintée de conflit à entraver la croissance, les mêmes questions doivent se poser aussi sur la présence de telles peurs et conflits dans le contretransfert de l'analyste. Les analystes relationnels se sont fortement focalisés sur l'instrumentalité du contretransfert et sur les moyens puissants en jeu dans les actions de l'analyste, qui perturbent ou facilitent le changement psychique chez le patient.

34 Traduction du titre non disponible en français : « Ce que les patients apportent dans l'analyse » (NdT)

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