Le Dictionnaire Encyclopédique de la Psychanalyse

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« Soi familial » prédominant dans la psyché japonaise, lequel est enraciné dans les relations hiérarchiques émotionnelles subtiles de la famille et du groupe par rapport au « Soi individuel » occidental. Reischauer (1977) observe que les japonais ne sont pas tout à fait autant attachés à leur famille mais davantage aux groupes auxquels ils sont entourés. Cela peut suggérer la notion d'un « Soi collectif » dans le sens qu'un enfant s'identifie très tôt et internalise sa place dans un groupe. Une fête rituelle traditionnelle appelée Hichi-Go-San illustre bien cette dynamique. Les enfants âgés entre 2 à 3 ans, 4 à 5 ans et 6 à 7 ans sont le point focal d'une fête en costume traditionnel, où ils sont amenés au temple local de la communauté. Ils obtiennent en cadeau des friandises et des jouets pour fêter collectivement leur passage dans l'enfance.

IV. LES IMPLICATIONS PSYCHANALYTIQUES DU CONCEPT AMAE

Comme nous l'avons évoqué plus haut, le concept amae que Doi a proposé, dans le but de démontrer ce phénomène particulier dans la société japonaise et dans les interactions cliniques, était à bien des égards exact et perspicace. Cependant, cette première définition du concept amae (1973), notamment qu'il implique « un besoin de dépendance, dans l’impuissance » et de « désir d'être aimé » a déclenché un certain nombre de débats théoriques et cliniques. Du point de vue développemental, amae précède l'acquisition du langage par l'enfant. Par exemple, les japonais disent de l'enfant qui exprime activement son désir pour sa mère : « Cet enfant est déjà si dépendant émotionnellement ( amaeru ). » Lorsque l'enfant continue de vivre l'expérience du désir de la présence de sa mère, cette configuration émotionnelle se positionne au cœur de sa vie émotionnelle, consciemment et inconsciemment. Cela peut se comparer à ce que Freud disait du concept de « sexualité » exclusif à la psychanalyse. « Nous nous servons du mot sexualität [‘sexualité’] en lui attribuant le sens élargi du mot allemand lieben [‘aimer’]» (Freud, 1910). Dans ce sens, les japonais considèrent que le complexe d'Œdipe est en quelque sorte un amalgame où l'amour et le sexe sont entremêlés, même s'il n'y a pas de mot équivalent à lieben , ou amour, dans la langue japonaise. Par analogie, nous pouvons considérer que la notion « amae » représente le corps principal de la vie émotionnelle tout au long de notre existence avant le complexe d'Œdipe, même dans une culture en dehors du Japon, où le mot « amae » n'existe pas encore. Alors qu’amae est un concept verbal qui ressemble à l'amour, contrairement à l'amour, cependant, il se caractérise par le fait qu'il ne contient pas de « sexualité » en elle-même. De plus, certains éléments indiquent que dans amae des états psychiques variés y sont contenus, qui sous- entendent une certaine ambivalence. Dans ce cas, il peut être utile de comparer amae à des différents concepts psychanalytiques connus.

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