FNH N° 1053

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JEUDI 3 FÉVRIER 2022 FINANCES NEWS HEBDO

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◆ Pour 100.000 habitants, 5 à 10 Marocains se suicident. ◆ 10% de la population sont concernées par les états dépressifs, accentués durant la pandémie. ◆ Entretien avec Docteur Hafsa Abouelfaraj, psychiatre et psychothérapeute. «Aucune cause unique ne peut expliquer ou prédire un suicide» xcwv Santé mentale

Propos recueillis par Ibtissam Z.

Finances News Hebdo : Chaque année dans le monde près de 800.000 per- sonnes mettent fin à leur vie, soit un décès toutes les 40 secondes. En tant que praticienne, quel regard portez-vous sur ce phénomène ? Dr Hafsa Abouelfaraj : Le passage à l’acte suicidaire est une tentative pour rompre un état de tension psychique intolérable. C’est un problème sérieux de santé publique, mais difficile à aborder à cause des fac- teurs religieux et socioculturels. Le rapport publié par l’OMS souligne que pour 100.000 habitants, 5 à 10 Marocains se suicident. Ce triste constat tire la sonnette d’alarme sur les conséquences médicales et psychosociales qu’engendre le suicide. La stigmatisation associée aux troubles mentaux et au sui- cide dissuade de nombreuses personnes à demander de l’aide. Malgré les données factuelles indiquant que de nombreux décès sont évitables, le suicide est malheureuse- ment relégué en queue des priorités. C’est un phénomène qui n’épargne personne, il concerne tous les âges et tous les niveaux sociaux et intellectuels. Une étude maro- caine publiée en 2020 a montré que 5% des étudiants en médecine avaient réalisé au moins une tentative de suicide et 31% avaient eu des idées suicidaires. Les enfants et les adolescents sont aussi concernés. La notion de mort chez l’enfant ne peut être assimilée aux représentations qu’en ont les adultes. Ce qui rend difficile l’évaluation de l’intention de mourir chez un enfant. Par ailleurs, la résistance de la

La crise sanitaire de la Covid-19 a révélé la vulnérabilité psychique de nombreux Marocains.

le nombre de suicide a augmen- té. Comment expliquez-vous cette hausse et qu’en est-il de la situation dans le Royaume ? H. A. : Depuis le début de la pandémie, des experts du monde entier se sont inquiétés des risques d'augmentation des suicides en raison des facteurs tels que le stress ou encore les difficultés économiques. Malheureusement, notre pays ne fait pas l’exception. Des statistiques récentes

part des parents à admettre la réalité de la problématique suicidaire chez l’enfant rend son repérage difficile. C’est ainsi que bon nombre d’accidents domestiques ou de comportements de mise en danger de la part de l’enfant pour- raient comporter une dimension suicidaire, souvent méconnue.

F.N.H. : Avec la crise sanitaire et durant la période de confinement,

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