T RIBUNE LIBRE
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MARDI 31 AOÛT 2021 FINANCES NEWS HEBDO
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Ce patriotisme qui nous manque D ans le dernier discours royal pro- noncé à l’occasion du 68 ème anni- versaire de «la Révolution du Roi et du Peuple» , une phrase en particulier vient résumer l’essence Par Rachid Achachi, enseignant en Sciences de gestion, consultant et chroniqueur
construit à travers un nivellement par le bas. Souvent incontrôlable et toujours manipu- lable, elle sert d’armée de réserve autant aux partis politiques, qui en font des situations de rentes politiques, qu’au marché qui y voit un émonctoire de sa surproduction. Car le peuple, contrairement à la masse, est une réalité culturelle et civilisationnelle qui se définit par rapport à des valeurs, des principes et un devoir de solidarité. Quant à la nation, elle est l’expression politique du peuple en acte. Enfin, le vide idéologique. Entre l’effondre- ment de la gauche marocaine, l’ascension de la technocratie et d’un certain populisme conservateur, les Marocains n’ont plus le droit, depuis des années, qu’à des discours politiques stériles ou populistes sans pro- fondeur aucune, mais parsemés ici et là d’un vocabulaire importé clé en main. Car étant la traduction politique et philosophique d’une vision culturellement ancrée, l’idéologie sert de ciment invisible et d’horizon collectif au peuple. Elle offre à l’Etat une capacité d’enrôlement et de canalisation des énergies et des talents, qu’il peut intégrer dans un projet national dépassant les subjectivités et les intérêts particuliers. De même, inscrit dans le cadre d’une grande idée nationale, le sacrifice acquiert un caractère naturel. Car quel Marocain serait prêt à sacrifier son confort, son temps, ses efforts, voire sa vie pour «la bonne gouvernance» ? Pour un meil- leur classement dans le «Doing Business» ? Ou encore pour une meilleure note auprès de «Fitch Rating» ou de «Standard and Poor's» ? Aucun. Par contre, beaucoup sont prêts à le faire pour la grandeur de leur pays, pour la dignité, pour la liberté et la souverai- neté, autrement dit pour des idées. Il en résulte qu’il ne peut être question de patriotisme sincère et intelligent, sans une conscience collective, un peuple instruit, édu- qué et vivant dans la dignité, et un cadre idéologique capable d’offrir un horizon poli- tique et civilisationnel à tous les citoyens. Ces missions nous incombent à tous, partis politiques, société civile et citoyens. Il serait ainsi vain de chercher des boucs émissaires, là où il s’agit de fédérer les forces vives, de lancer de nouvelles dynamiques et de faire preuve de responsabilité et d’engagement autant individuel que collectif. ◆
même des attentes du Souverain quant à l’implication des forces vives de la nation dans la défense des intérêts suprême du pays : «Si par le passé, la Révolution du Roi et du peuple a constitué un tournant historique pour le Maroc dans sa quête de la liberté et de l’indépendance, aujourd’hui s’ouvre devant nous une nouvelle étape où le patrio- tisme sincère est de mise pour relever les défis internes et externes». L’expression «patriotisme sincère» qui dans une situation idéale aurait été un pléonasme, ne constitue pas ici une simple figure de style ou une ornementation rhétorique, mais ren- voie à paradigme qui mérite d’être analysé en profondeur et défini de manière claire et tranchée. On peut dans un premier temps le définir par ce qu’il n’est pas, en le distinguant de ce que je qualifie de «patriotisme des pancartes» , celui du pathos, de l’émotionnel qui étant par nature fugace et contingent, ne saurait servir de base à une vraie cohésion et dynamique nationale. Ce patriotisme n’exige aucun sacri- fice, se dégonfle à la première adversité et change facilement de camp en fonction des aléas de l’actualité ou des intérêts particu- liers. Privée d’un profond ancrage des valeurs fondatrices de notre civilisation mais sur- tout, dépourvue d’une fine compréhension des grands enjeux contemporains et défis majeurs du Maroc, cette posture ou impos- ture patriotique selon les cas, n’épargne ni l’élite, ni la classe moyenne ni les couches populaires. Elle est le résultat objectif de trois éléments. Le premier, c’est le manque cruel de commu- nication entre l’Etat et le peuple concernant les grandes questions nationales. Car mis à part le Roi, qui à travers ses discours, apporte un éclairage et une visibilité aux citoyens quant aux orientations majeures du pays, qui au Maroc explique aux citoyens pourquoi ils
devraient se sentir mus et fermement enga- gés par ces questions qui leur paraissent souvent lointaines et abstraites ? Le gouvernement dirigé par Saad Eddine El Otmani ? La crise sanitaire a démontré que l’exécutif ne sait globalement communiquer qu’à coup de décrets et décisions de minuit, quand il ne se mure pas dans un silence de mort. Le ministère des Affaires étrangères ? Sans rien ôter à l’excellent travail réalisé ces der- nières années,, force est de constater qu’au niveau communicationnel, les citoyens maro- cains peuvent plus facilement se renseigner auprès des médias étrangers et des fuites occasionnelles de documents, qu’auprès du ministère lui-même ou de ces rarissimes interventions dans les médias nationaux. Les élus ? mises à part quelques exceptions, n’en parlons même pas. Les partis politiques ? Ces derniers, par une autocensure totalement anachronique et en s’inventant des tabous politiques imaginaires, préfèrent investir les questions payantes élec- toralement, et souvent quelques semaines avant les échéances électorales. Le deuxième, c’est la faillite éducative. Car l’instruction, les valeurs et la conscience poli- tique sont ce qui sépare la foule et la masse, du peuple et de la nation. Etant dépourvue de culture, de morale profondément ancrée et de d’esprit critique, l’intelligence de la masse se
Entre l’effon- drement de la gauche marocaine…, les Marocains n’ont plus le droit, depuis des années, qu’à des dis- cours poli- tiques stériles ou populistes.
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