FNH N° 1098

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CULTURE

FINANCES NEWS HEBDO

MARDI 28 FÉVRIER 2023

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Heureusement, j’ai été éducateur de rue et j’ai un côté burlesque et cartoo- nesque en moi qui m’a beaucoup aidé à les diriger. Et puis, ils me connais- saient, ce qui m’a permis d’instal- ler cette atmosphère de détente et d’humour. Au final, ils étaient hyper studieux et connaissaient parfaite- ment leur texte. Certains ont même accepté de se raser la tête, ce qui n’était pas évident pour des pré-ados. Personnellement, je crois que je pré-

fère travailler avec des enfants, car quand ils t’ap- précient, c’est plus facile qu’avec des adultes. F.N.H. : Les avez-vous emmenés à l’hôpital pour qu’ils se familia-

«Les enfants ne sont pas comme des acteurs professionnels : s’ils se braquent, c’est fichu. Heureusement, j’ai été éducateur de rue et j’ai un côté burlesque et cartoonesque en moi qui m’a beaucoup aidé à les diriger». (Booder)

risent avec la maladie ? Booder : On n’avait pas le droit, car c’était juste après la pandémie. Mais de toutes façons, je pense que cela aurait été difficile, car les enfants que j’allais voir à l’hôpital portent des char- lottes, des blouses, des masques. Je voulais aussi que mes petits acteurs conservent leur innocence. Je connais même des adultes qui ont du mal à aller dans les hôpitaux et je n’ai pas voulu aller dans cette direction. F.N.H. : Le traitement des cou- leurs et de la lumière n’est pas le même à l’hôpital et dans le monde extérieur. Booder : C’était voulu pour apporter de la joie dans un espace qui, par définition, en est souvent dépourvu. À l’origine, je voulais tourner le film en noir et blanc, puis passer à la couleur uniquement au moment où Momo arrive à l’hôpital. On a changé notre fusil d’épaule tout en gardant un peu de cette inspiration, et Gaëlle a eu la formidable idée d’un traitement différencié des couleurs. C’est ce qui permet de dédramatiser l’univers de l’hôpital : on ne voulait pas de murs tout blancs. D’ailleurs, quand on va au service de leucémie ou de cancérolo- gie, il y a plein de dessins et de cou- leurs, et ce n’est ni morose, ni lugubre. F.N.H. : Quand on entre dans l’espace de Michel, à l’hôpital, on bascule dans un univers féé- rique, presque irréel. Booder : Sa loge, c’est son chez lui.

ger des gens extraordinaires, comme Fanny Dumont, formidable comédienne belge, qui joue l’infirmière. Ou encore Gérard Giroudon, qui campe Michel et qui est sociétaire de la Comédie fran- çaise. Au casting, j’ai été charmé par son regard, par sa manière de parler, et la complicité entre nous a été une évi- dence pendant les répétitions. F.N.H. : Et les enfants ? Booder : Je ne voulais pas engager d’enfants comédiens, car je tenais à ce qu’ils dégagent quelque chose d’as- sez frais pour jouer sur l’innocence de l’enfance. Après un casting tradition- nel, nous avons organisé des lectures et des ateliers pour qu’ils répètent les scènes une par une et pour que chacun sache précisément ce qu’il avait à faire sur le plateau. J’ai expliqué à chacun quel était son rôle et le contexte par- ticulier du film : je leur ai parlé de ces enfants malades qui rêvent seulement de se tenir debout. Il fallait vraiment les accompagner et faire de la pédagogie, et il était fondamental d’instaurer une complicité et un climat de rigolade avec eux. F.N.H. : Avez-vous eu du mal à travailler avec eux ? Booder : On a répété les scènes une par une pour que chacun sache ce qu’il avait à faire sur le plateau. Les enfants ne sont pas comme des acteurs profes- sionnels : s’ils se braquent, c’est fichu.

rire personne et je suis enfin quelqu’un dans un endroit que je fuyais à cause de ma maladie ». Le destin a voulu que Momo suscite le rire dans un endroit qu’il déteste en tant que malade. Mais cela lui permet aussi de ne pas se mor- fondre, car il y a pire que sa situation. Ce qui est très particulier, c’est qu’il encourage les enfants à se soigner, et qu’il se bat notamment avec Lola pour qu’elle se soigne, alors que lui-même ne se soigne pas. F.N.H. : Les enfants sont tous d’âges différents, ce qui ajoute à la difficulté, mais aussi à la richesse du groupe. Booder : Dans les services hospita- liers, on vous classe par maladie, pas par tranche d’âge. C’est pour cela que Lola s’ennuie : elle n’est pas avec des jeunes de son âge. Alors qu’elle a envie de vivre et de sortir, on l’en empêche : on lui dit qu’elle va rester plus long- temps à l’hôpital et elle se retrouve avec des gamins. Autant dire qu’elle n’a aucun intérêt pour le cirque ou pour les clowns ! F.N.H. : Comment s’est passé le casting des adultes ? Booder : Comme il s’agit de mon pre- mier long métrage, je ne voulais aucune star, aucun comédien confirmé, parce que je me disais que ce film s’inscrit dans un esprit de passage de relais. Mais cela ne m’a pas empêché d’enga-

Personnellement, je crois que je préfère travailler avec des enfants, car quand ils t’apprécient, c’est plus facile qu’avec des adultes.

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