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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 20 MAI 2021
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Hammadi Ammor
◆ Dans les années 40, quelques hommes de feu et de cœur ont œuvré à l’épanouissement du théâtre marocain, qui venait d’éclore. Hammadi Ammor, décédé vendredi dernier (Journée nationale du théâtre) à l’âge de 90 ans, est de ceux-là. Monstre sacré du théâtre et voix culte
Un exploit sans lendemain. Une gloire évanescente. A cause d'une sommation parentale. Craignant que leur enfant ne perdit son âme dans les bras tentaculaires de la sulfureuse métropole, les parents de Hammadi Ammor lui ordon- nèrent de rentrer prestement dans le giron familial. Ce qu'il fit, la mort dans l'âme. Illusions perdues ? Non, car le destin veillait. Dès son retour à Fès, il fut sollicité de monter la pièce dans laquelle il s'était distingué à Casablanca : Je suis le meurtrier. La version qu'il en fit recueillit une adhé- sion unanime. Auréolé de cette réussite ful- gurante, le tout jeune homme appareilla vers la ville qui l'avait révélé. C'était à Casablanca où s'accomplissait l'œuvre. Et Hammadi Ammor enten- dait s'accomplir. Il fonda une troupe «Arrachad Al Masrahi» devenue quelque temps après «Al Manar Al Masrahi» , dont les prestations étaient fort prisées par le public, mais vues d'un mauvais œil par l'occupant. Il faut dire que le contexte était sensible. Le Maroc secouait ses fers et le théâtre devait soutenir cette volonté impérieuse d'émanci- pation. Mais comment insinuer des messages libérateurs sans tomber dans les rets de la cen- sure sourcilleuse ? Hammadi Ammor usa de mille subterfuges pour passer entre les mailles des filets vigilants. «La conquête de l'Andalou- sie» et «Saladin», pièces aux titres pourtant évocateurs, passèrent comme une lettre à
la poste, au nez et à la barbe de l'occupant. En revanche, «Le clou de Jeha», qui se présentait comme une fantai- sie anodine, l'incommoda. Il y vit malice instigatrice et décida de sévir. Hammadi Ammor dut prendre la poudre d'escampette. Il parvint, par d'infinis tours et détours, au Caire, où il deman- da refuge. On était à l'orée des années cinquante. A son retour, Hammadi Ammor rejoi- gnit la très fringante troupe du théâtre radiophonique for- mée d’Abderrazak Hakam, Larbi Doghmi, Amina Rachid, Habiba Medkouri, Hammadi Tounsi, Mohamed Hammad Lazrak, et dirigée de main de maître par une figure emblé- matique, Abdallah Chekroun. La radio marocaine était encore à ses premiers bal- butiements. Son plus beau fleuron était l'émission théâ- trale que les auditeurs guet- taient rituellement le jeudi et le dimanche soirs. Heureuse époque qui forme en nous, autour de nous, une mémoire scintillante… Hammadi Ammor coula une retraite paisible, dont il ne s'extrait que rarement, juste pour ne pas désobliger un ami qui l'invite à jouer un rôle dans une pièce ou un film. Le reste du temps, il le passait essen- tiellement à savourer les sou- venirs de tout ce que l'exis- tence lui a accordé en partage. Il en faisait son miel. ◆
franchir l'étroit passage entre la salle et la scène ! Mais la pièce était presque prête, les rôles déjà répartis, les person- nages définitivement campés. Coup de théâtre : un des acteurs déclara forfait. Hammadi Ammor vit dans cette défection un signe du destin; il s'empressa de propo- ser ses services. Le metteur en scène, un Français, fut médu- sé par une telle audace, puis impressionné par la fougue du tendre postulant : il lui donna sa chance. Bien lui en prit. Car l'apprenti comédien s'acquitta de son rôle avec l'aisance d'un vieux briscard, pendant les répéti- tions. Il fut encore plus impo- sant le soir de la première, au défunt Théâtre municipal, brû- lant les planches et happant le regard du public conquis par son étonnante maestria. Cela se passa le 18 février 1948, une date – qui fut – indé- lébilement incrustée dans la mémoire de Hammadi Ammor.
H ammadi Ammor fut précocement pris de fièvre théâtrale. Ainsi, n'hésita-t-il pas à sacrifier ses études qu'il suivait distraite- ment à Fès, pour se consu- mer délicieusement à sa pas- sion. Et le voilà déboulant à Casablanca sans aucun via- tique, si ce n'est son ambition ardente de monter un jour sur les planches. Il avait à peine seize ans, l'âge des rêves insensés. Les siens l'étaient, puis se transmuèrent en réalité par le miracle d'une rencontre. En effet, un comé- dien, dont il força l'amitié, était engagé dans une troupe théâ- trale. Hammadi Ammor demanda à l'accompagner aux répétitions. Il s'empressa d'exaucer son vœu. L'adolescent prit l'habi- tude de s'y rendre et de s'émer- veiller avec un pincement au cœur. Que ne donnerait-il pour Par R. K. Houdaïfa
Il fut encore plus imposant le soir de la première, au défunt Théâtre municipal, brûlant les planches et happant le regard du public conquis par son éton- nante maes- tria.
*A sa famille, ses ami(e)s, Finances News Hebdo présente ses sincères condoléances.
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