FNH N° 1058

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ECONOMIE

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 17 MARS 2022

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Il était une fois, la charte de l'investissement… L’ actualité nationale (pandémie, sécheresse) et internationale (conflit Ukraine /Russie) a quelque peu écrasé la problé- matique d'une nouvelle charte Par Mustapha SEHIMI Professeur de droit, Politologue

de l'investissement. Un dossier en instance depuis… plus d'un quart de siècle - la pré- cédente date en effet de 1995. Cinq cabi- nets se sont pourtant succédé sans qu'une avancée significative n’ait été vraiment enregistrée à cet égard : loin de là. Il faut faire crédit au gouvernement Akhannouch d'avoir inscrit ce dossier dans son pro- gramme d'investiture en octobre dernier et de paraître s'y atteler aujourd'hui. Il faut dire qu'une ferme orientation a été donnée par le Souverain. A preuve, la séance de travail qu'il a présidée le 16 février dernier. Nouveaux avantages Jusqu'à présent, la charte de l'investisse- ment encore en vigueur était limitée à une série de mesures fiscales et à d'autres inté- ressant le foncier – pas plus. Il fallait bien mettre de l'ordre en donnant davantage de cohérence et de globalité à ce dispositif. Un département dédié, confié à Mohcine Jazouli, a été ainsi créé dans le nouvel exé- cutif, avec un ministre délégué chargé de l'Investissement, de la Convergence et de l'Evaluation des politiques publiques. Quel est l'objectif ? Porter la part de l'investis- sement privé dans l'investissement total d'un tiers seulement aux deux tiers, et ce à l'horizon 2035. Dans cette perspective, les axes retenus sont les suivants : création d'emplois, promotion d'un développement équitable des territoires, priorisation des secteurs porteurs pour l'économie natio- nale. Dans le détail, la déclinaison doit se faire suivant des régimes particuliers : celui d'un dispositif de soutien principal avec des primes communes éligibles aux objectifs du nouveau modèle de développement et aux priorités fixées par le gouvernement; celui, additionnel celui-là, profitant à l'encourage- ment de l'investissement dans les provinces et préfectures les moins favorisées (Al Hoceima, Berkane, Boujdour, Chefchaouen, Es-Smara, Guelmim, Laayoune, Larache, Nador, Oued Eddahab, Oujda Angad, Tanger -Assilah Fahs-Bni-Makada, Tan-Tan,

Taounate, Taourirt, Tata, Taza, Tétouan); celui, aussi, d'une prime sectorielle en direc- tion de secteurs porteurs; celui encore prévu sur la base de mesures d'appui exclusives pour les projets à caractère stratégique (industries de la défense et industrie phar- maceutique); enfin, celui des PME et des TPME. Il faut y ajouter un dispositif pour le développement des investissements étran- gers à l'étranger. Dans le détail, un premier lot d'avantages est lié à la phase de création : droits d'enre- gistrement, droits de douane, TVA, suppres- sion de la taxe variable, impôt sur les socié- tés (IS) à 0% pour les industries en création pendant 5 ans. Le second, lui, couvre des avantages additionnels : prise en charge de certaines dépenses (acquisition de terrain, infrastructures externes, formation profes- sionnelle, Fonds de promotion des inves- tissements, réserve foncière ,...). D'autres incitations sont examinées, notamment au moins une zone franche par région, octroi d'un statut de zone franche : le développe- ment aux grandes industries exportatrices hors zone franche, statut exportateur indi- rect aux sous-traitants. Interrogations Cela dit, bien des interrogations subsistent quant à l'optimisation attendue de la nou- velle charte. En premier lieu, que fait-on pour le secteur informel qui réalise plus de 30% du PIB ? Il ne peut être aidé que si l'on

opère sa restructuration. Et à cette fin, une réflexion novatrice doit être faite. Cette évo- lution vers une intégration progressive dans l'économie formelle ne se décrète pas; elle doit pouvoir modifier des comportements et surmonter des rigidités pour arriver à pousser le monde du travail informel dans cette direction. De la communication. De la sensibilisation aussi pour que ces tra- vailleurs soient amenés à sauter le pas... Ils doivent y adhérer en étant convaincus qu'ils ne peuvent qu'y gagner. En deuxième lieu, est-il prévu un régime spécifique pour les start-up marocaines ? Ce qui est en cause, pour commencer, c'est que les grandes entreprises et les institu- tions publiques s'ouvrent à des partenariats avec des start-up. Celles-ci sont un moyen et un vecteur de la relance économique. La pandémie Covid-19, depuis deux ans, a contribué à ce que les entreprises revoient leur organisation et leurs processus internes dans un souci d'agilité, dans un contexte en changement permanent. Les start-up maî- trisent en effet les nouvelles technologies; elles savent capitaliser sur la data pour proposer des enjeux opérationnels; elles ont ainsi un impact potentiel en déployant des solutions innovantes dans la gestion à distance. Il est utile que la nouvelle charte se préoccupe d'élargir les ponts entre les centres de recherche et l'écosystème start- up, tant il est vrai que les synergies sont importantes. C'est dire que des mesures

Il est utile que la nou- velle charte se préoccupe d'élargir les ponts entre les centres de recherche et l'écosystème start-up.

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