ÉCLAIRAGE
LE JET D’EAU SE DÉVOILE
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cessaient le travail, le soir et les jours de congé. J’ai donc initialement servi de soupape pour le réseau hydraulique. Je n’avais pas d’autre raison d’être. Les responsables de l’usine n’avaient pas prévu que je susciterais la curiosité et l’admiration des Genevois, qui commencèrent à affluer pour me voir durant leur temps libre. Les autorités communales m’ont alors déplacé au bout de la jetée des Eaux-Vives. En 1891, j’atteignais une hauteur de 90 mètres dans mon habit de lumière à l’occasion de la Fête fédérale de gymnastique et des 600 ans de la Confédération helvétique.
Il est le symbole de Genève par excellence. Son élégance est réputée sur les cinq continents, sans qu’il se prenne pour une des sept merveilles du monde. Le Jet d’eau n’a d’ailleurs pas hésité une seconde à nous dévoiler tous ses secrets. Interview. Vous avez jailli pour la première fois en 1886, vous en souvenez-vous encore? La gare Cornavin n’avait que dix ans et la tour Eiffel était encore à l’état de projet ! Je n’étais propulsé qu’à une hauteur de 30 mètres à l’époque. Il est vrai qu’en 1886, année de l’entrée en fonction de l’usine hydraulique de la Coulouvrenière – qui fut en quelque sorte mon berceau –, je n’étais pas encore une attraction touristique. En fait, je suis né pour des raisons de sécurité. L’usine pom- pait l’eau du Rhône pour la redistribuer, sous pression, aux artisans et aux industriels de la ville. Mais il y avait un risque de surpression lorsque ces ouvriers et artisans
Aujourd’hui, vous culminez à 140 mètres au-dessus de la rade!
La vue que j’avais sur la rade devenait de plus en plus magnifique ! Une évolution due à la construction d’une station de pompage, mise en service en 1951, qui puise l’eau du lac et me propulse dans les airs à 200 km/h! J’avoue que je n’y connais rien en technique, mais je sais que cette station très puissante permet de recueillir 500 litres d’eau par seconde. Et pour que mon flux soit le plus beau possible, les entrées de la station de pompage sont équipées de grilles qui filtrent les algues et autres déchets. Le jet d’eau du roi Fahd en Arabie Saoudite atteint 312 mètres. Celui de Séoul, 202 mètres. Un peu de jalousie, non? Non. Ma raison d’être, c’est de faire briller les yeux des spectateurs, pas de les faire pleurer d’émotion ! Le fait d’être si près de la rive m’oblige aussi à une certaine retenue. A la hauteur de 140 mètres, suivant l’orientation et la force du vent, il m’arrive déjà d’arroser les passants, ce qui m’amuse beaucoup. Mais je ne voudrais pas devenir un problème. Vous vous êtes paré de bleu cette année au mois d’octobre pour célébrer les 75 ans de l’ONU. Cela vous arrive souvent de vous habiller en couleurs? Je me suis aussi exhibé en jaune à l’occasion des Fêtes de Genève ou en rose dans le cadre d’une campagne de prévention du cancer du sein. Mais j’adore ma couleur naturelle, le blanc, que je dois au mélange d’eau et d’oxygène qui me constitue. Sans les bulles d’air, je serais en effet transparent et l’on me verrait à peine depuis les quais! J’ai aussi failli être coloré en brun pour la publicité d’une marque de chocolat, mais ceux qui s’occupent de moi ont rejeté la proposition.
Le Jet d’eau contemple les baigneurs tout au long de l’année, et vice versa.
èremagazine | décembre 2020
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