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ECONOMIE
FINANCES NEWS HEBDO
VENDREDI 12 MARS 2021
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l’information qui comporte des restrictions considérables et qui ne porte pas à consé- quences… La liste est longue. Maintenant, l’Agence de lutte contre la corruption a été une pièce maîtresse dans la promotion de l’intégrité, dans tous les pays qui ont exprimé une volonté réelle et ont réussi dans leur lutte contre la cor-
ruption. Cependant, ce type d’insti- tution doit disposer des attributions nécessaires, d’un pouvoir d’investi- gation et d’indépendance pour faire son travail en toute sérénité et effi- cacité. Transparency Maroc a avisé, au moment de la mise en place de l’Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC), que les condi- tions minimales requises n’étaient pas
La corruption affecte la pertinence et l’efficacité des politiques publiques dans leur ensemble, la justice, l’équité, les institutions et la démocratie.
réunies. L’expérience a montré que nous avions raison. Le projet de l’instance de probité (INPPLC) vient après cet échec. Elle a du mal à se mettre en place, malgré notamment les dispositions de l’article 36 de la Constitution, qui souligne l’importance de l’indépendance de cette institution, et de plus larges attributions sur le plan de l’investigation. Et la nécessité d’adopter des dispositions contre le conflit d’intérêt endémique dans notre pays. En fait, tous ces éléments cruciaux sont ignorés ou combattus, malgré des discours officiels forts sur le sujet. Le projet de la loi de l’Ins- tance de probité a du mal à intégrer ces prérequis indispensables à la lutte contre la corruption et rencontre, en plus, une hosti- lité de certaines institutions de l’Etat et de forces politiques. Que dire de la Stratégie nationale de lutte contre la corruption qui a nécessité un travail collectif considérable, mais qui est mise en sommeil ! F.N.H. : Le classement de l'indice de perception de la corruption 2020 est dominé, entre autres, par des pays comme le Danemark, la Nouvelle Zélande, la Finlande, Singapour. Selon vous, quels sont les princi- paux atouts de ces pays qui arrivent pratiquement à éradiquer ce fléau qui fait perdre annuellement au Maroc près de 5% de son PIB ? A. A. : D’abord, il faut préciser que la perte n’est pas seulement économique ou financière. Elle est beaucoup plus large et grave. La corruption affecte la pertinence et l’efficacité des politiques publiques dans leur ensemble, la justice, l’équité, les insti- tutions et la démocratie. Il n’est pas ima- ginable qu’on puisse amorcer un nouveau
«modèle» de développement sans sortir de la corruption endémique, qui représente actuellement un pilier et une béquille de l’économie de rente. La corruption existe dans la plupart des pays; elle se manifeste à des degrés et des échelles variables. Les pays que vous citez sont en général en tête des indicateurs (de la transparence et de lutte contre la corruption), de la démocratie, de la gouvernance et des libertés humaines. Dans ces pays, c’est le respect des lois, des institutions de contrôle qui fonctionnent en toute indépendance ainsi que la justice qui font la différence. Pas besoin de préciser que des rapports de la Cour supérieure des comptes, des scandales, des dossiers énormes de dilapi- dation des deniers publics et de corruption n’aboutissent presque jamais dans notre pays. Quand des institutions comme le Conseil de la concurrence osent appliquer ce que prévoient la loi et leur statut, ils sont souvent rappelés à l’ordre ! F.N.H. : Il semblerait que la pandé- mie serait un facteur de renforce- ment de la corruption au Maroc. Etes-vous d'accord avec cette thèse ? A. A. : Il y a eu plusieurs études et rapports à l’échelle internationale qui ont présenté des données et attiré l’attention sur l’aggra- vation de la pratique de corruption dans le contexte de la Covid-19. Ceci s’explique par l’adoption de l’Etat d’urgence sani- taire qui autorise les différentes branches de l’exécutif, sans le respect des condi- tions requises par la concurrence et les appels d’offres. Dans de nombreux mar-
chés publics, la décision est encore plus discrétionnaire et opaque que dans les procédures habituelles. Ce sont des fac- teurs déterminants dans l’augmentation du risque de corruption. Dans le cas du Maroc, des éléments troublants ont été rendus publics sur notamment des marchés des tests Covid-19… L’«assouplissement» des procédures de passation des marchés publics est susceptible de nous appor- ter beaucoup de mauvaises surprises si les pouvoirs publics devaient réaliser des audits de manière exhaustive (et surtout communiquer l’information). En période de crise majeure des finances publiques, je suis sidéré par la multiplication des mar- chés de travaux de tout genre dans nos villes… Le gaspillage (ou plus) est visible à l’œil nu ! F.N.H. : Enfin, selon vous, où mettre l'accent pour permettre au Maroc de s'extirper de la «zone de cor- ruption chronique» comme le men- tionne Transparency Maroc ? A. A. : La société civile et Transparency Maroc - depuis un quart de siècle - n’ont cessé de faire des études, analyses et de formuler des propositions dans les domaines législatif, institutionnel, éducatif ou tech- nique pour faire sortir le Maroc de la zone de la corruption endémique. Les propositions déterminantes et décisives dans le domaine ont été soit ignorées, soit rendues faibles et ineffectives. Au final, ce qui manque fon- damentalement, c’est une volonté politique réelle d’agir de manière décisive, et de ne pas demeurer simplement au niveau du dis- cours politique (Al khitab !). ◆
Quand des institutions comme le Conseil de la concurrence osent appli- quer ce que prévoient la loi et leur sta- tut, ils sont souvent rappelés à l’ordre !
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