FNH N° 1024 ok (1)

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ECONOMIE

FINANCES NEWS HEBDO

VENDREDI 28 MAI 2021

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«Les finances du pays sont gérées au jour le jour»

◆ Concernant la croissance pour 2021, les facteurs positifs seraient malheureusement largement contrebalancés par des facteurs défavorables, lesquels poussent au contraire à un certain pessimisme. ◆ Au-delà de la dynamique et du niveau de l’endettement donc, ce qui est inquiétant est que les dépenses financées par la

dette actuelle ne permettent pas de mieux préparer l’avenir. ◆ C’est l’avis de Najib Akesbi, économiste et professeur.

tion à une autre, le plus important est de faire le point à mi-chemin de l’année. La question essentielle à se poser est de savoir où on va et comment évolue la conjoncture écono- mique. Je reste fidèle à la même analyse faite lors de l’entretien accordé à F.N.H, début jan- vier 2021 (paru dans le numéro du 7 janvier 2021, ndrl). J’avais mis en relief les facteurs déterminants de l’évolution de la conjoncture économique qui sont l’évolution de la pan- démie, la situation de la campagne agricole, la reprise mondiale, notamment en Europe, ainsi que les politiques publiques mises en œuvre, notamment les nouvelles orientations du «modèle de développement». A peu près à mi-parcours, il est intéressant aujourd’hui d’interroger ces facteurs déterminants afin de savoir si ceux-ci laissent présager un scé- nario plutôt optimiste ou plutôt pessimiste. Commençons par la pandémie. Notons qu’on est actuellement à quelques 8 millions de personnes vaccinées au Maroc. C’est bien, c’est important, mais c’est encore loin de l’objectif fixé par le gouvernement. Je vous rappelle que l’objectif au départ était d’at- teindre un taux de vaccination de 80% de la population en 12 semaines, et le ministre de la Santé avait même été jusqu’à annon- cer la bonne nouvelle d’un « Ramadan sans mesures barrières » ! Hélas, nous sommes, fin mai, encore bien loin d’un tel objectif. Pire, valeur aujourd’hui, personne ne peut se hasarder à une quelconque prévision en la matière, et encore moins à nous dire quand nous atteindrons la fameuse immunité collec- tive. D’autant moins que l’approvisionnement en vaccins anti-covid-19 reste totalement aléatoire, et il est vraiment difficile de prédire les quantités de doses que recevra le Maroc dans les semaines et les mois à venir. Ce qui rend hasardeux la détermination du nombre de personnes vaccinées dans les prochains mois. Certes, la situation pandémique en

Europe s’améliore, comme en témoignent le déconfinement et la levée des mesures contraignantes dans plusieurs pays. Mais au Maroc, l’état d’urgence sanitaire (avec ses multiples contraintes qui malmènent l’éco- nomie autant que les personnes) est systé- matiquement prolongé de mois en mois, et la prochaine échéance est celle du 10 juin 2021. Assistera-t-on à un véritable «décon- finement», ouvrant la voie à une reprise des activités ? Espérons-le. Mais tous ces éléments montrent que nous restons dans le brouillard sur le front de l’évolution de la pandémie. Au niveau mondial, l’on assiste également à une situation contrastée. Aux USA et en Europe, les choses évoluent dans le bon sens mais, par contre, pour des pays aussi impor- tants comme l’Inde et le Brésil, la situation pandémique est toujours critique. L’irruption de nouveaux variants pourrait aussi remettre en cause tous les efforts qui ont été déployés pour endiguer le coronavirus… Voilà pour la pandémie. Maintenant, la bonne nouvelle vient de la campagne agricole qui est en effet très bonne cette année, et autorise un légitime optimisme. Grâce à la clémence du ciel, la récolte céréalière tranche avec les mauvais résultats des années précédentes. Or, vous le savez, la campagne agricole tire vers le haut à la fois le PIB agricole et le PIB de l’économie dans son ensemble. Pour moi, c’est le principal «clignotant vert». Ceci étant, la question à se poser est de savoir si la bonne campagne agricole va se traduire par de bons revenus pour la majorité des agricul- teurs. Or, ce qui se passe actuellement dans les marchés agricoles (comme en pareilles circonstances et depuis toujours hélas), laisse penser que les revenus des agricul- teurs ne seront pas à la hauteur, puisque faute de régulation publique, l’abondance

Propos recueillis par M. Diao

Finances News Hebdo : Selon les pré- visions de Bank Al-Maghrib (Conseil de mars 2021) et en tenant compte d’une production céréalière estimée autour de 95 millions de quintaux, la croissance de l’économie nationale devrait tourner autour de 5,3% en 2021. Que pensez-vous de ces prévi- sions au regard de la situation pan- démique au Maroc et à l’étranger ? Najib Akesbi : Au-delà des prévisions rela- tives à la croissance qui varient d’une institu-

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