FNH N° 1080

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BOURSE & FINANCES

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 13 OCTOBRE 2022

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tion galopante, la plupart des Marocains doivent aussi reconstituer leurs écono- mies, mises à mal pendant deux ans de pandémie; et donc une baisse de l’IR

ne se traduira pas nécessairement par une augmentation équivalente des dépenses des ménages et des recettes de TVA, ce qui permettrait d’atténuer les effets de la baisse de l’IR sur le budget de l’Etat. Toute augmentation des taux d’in- térêts, si elle permettra également de freiner les effets inflationnistes de la réforme proposée, accentuera davantage cette perte de recettes publiques.

Les résultats du dialogue social restent à être mis en œuvre par des mesures fiscales effectives, et leurs résultats concrets pourraient prendre plusieurs mois avant de pouvoir être constatés et analysés.

F.N.H. : Avec cette baisse attendue de l’IR, quels sont les grands changements qui vont s’opérer notamment en matière de salaires et de retraites ? Me N. R. : La baisse de l’IR (par un relè- vement de seuil ou une baisse de taux) devrait normalement correspondre, pour tous les salariés, à une baisse des montants retenus à la source par leur employeur et par conséquent une augmentation de leurs revenus nets et, c’est l’objectif économique, une aug- mentation de leurs dépenses. En même temps, cela réduit la pression sur les employeurs en ce qui concerne les augmentations de salaire qui resteront néanmoins nécessaires dans bien des cas. Cette mesure soulève une question juri- dique importante, qui revient à chaque fois qu’une baisse de l’IR est envisagée: à qui, de l’employeur ou du salarié, doit bénéficier la baisse de l’IR lorsque le salaire prévu au contrat de travail est stipulé net ? La pratique est encore assez répandue, contrairement à ce que l’on pourrait croire, et la question n’est pas tranchée du point de vue législatif, réglementaire ou jurisprudentiel, même si elle l’est (en faveur du salarié) du point de vue administratif. Par exemple, dans bien des cas, la CNSS n’admettra pas une modification du salaire men- suel brut déclaré. Aussi, sauf à ce que le législateur impose clairement que l’économie qui résulterait d’une baisse de l’IR doit être versée en intégralité au salarié, nonobs- tant toute stipulation contractuelle ou conventionnelle à l’effet contraire, la mesure envisagée pourrait ne pas avoir

l’effet économique escompté. Pour les retraités dépendant de la CNSS, un relèvement du seuil d’exoné- ration aura un effet immédiat sur leurs revenus mensuels nets et, ainsi, sur leur pouvoir d’achat. F.N.H. : Est-il envisageable que le gouvernement revoie à la baisse les taux d’imposition appliqués à d’autres catégories de salariés et pourquoi ? Me N. R. : Je ne peux rien affirmer concernant l’ampleur des mesures gou- vernementales à venir, mais c’est cer- tainement envisageable et c’est peut- être même nécessaire, si le but est de rétablir, au moins partiellement, le pou- voir d’achat de la majorité des contri- buables. Avec un salaire mensuel médian autour de 17.000 dirhams, il faudrait au moins que la partie de la population en-des- sous de cette moyenne nationale (50% par définition) puisse en profiter réel- lement. Les autres salariés en béné- ficieraient également, mais dans une moindre mesure, ce qui me paraît assez raisonnable. Mais l’impact sur le budget de l’Etat pourrait être trop important et il fau- dra donc sans doute faire un arbitrage et apporter une réponse économique plus nuancée. Le droit fiscal est, par sa nature, arbitraire dans son élaboration. En tout état de cause, les résultats du dialogue social, dont on perçoit aujourd’hui les échos, restent à être mis en œuvre par des mesures fiscales effectives; et leurs résultats concrets

pourraient prendre plusieurs mois avant de pouvoir être constatés et analysés.

F.N.H. : Cette année, le gouver- nement a augmenté le salaire minimum de 5%, une autre hausse de 5% est prévue l'an prochain, en plus de la hausse de 10% du SMAG actée également cette année. Quels impacts ces éléments peuvent-ils avoir sur le pouvoir d’achat des ménages ? Me N. R. : En effet, le décret n° 2-22-606 du 10 safar 1444 (7 septembre 2022) por- tant fixation des montants du salaire mini- mum légal dans l’industrie, le commerce, les professions libérales et l’agriculture, qui a été publié au bulletin officiel n° 7125 du 12 septembre 2022, a concrétisé l’ac- cord intervenu dans le cadre du dialogue social conclu en avril 2022. Ainsi, pour le secteur de l’industrie, du commerce et des professions libérales, le salaire minimum légal pour chaque heure du travail est désormais fixé à 15,55 dirhams, soit près de 3.000 dirhams par mois. L’augmentation du SMIG et du SMAG devrait normalement entraîner une augmentation du pouvoir d’achat des ménages et, partant, de leur consomma- tion en soutien au développement écono- mique. Cela reste toutefois à vérifier dans le contexte actuel où l’inflation reste lar- gement supérieure à la revalorisation des salaires nets envisagée et où le spectre d’une nouvelle pandémie peut amener les contribuables les plus vulnérables à éco- nomiser plutôt qu’à augmenter le niveau de leurs dépenses. ◆

Toute aug- mentation des taux d’in- térêt, si elle permettra de freiner les effets infla- tionnistes de

la réforme proposée, accentuera davantage cette perte de recettes publiques.

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