FNH N° 1110

33

ECONOMIE

JEUDI 25 MAI 2023 FINANCES NEWS HEBDO

www.fnh.ma

F.N.H. : Peut-on parler d’une véri- table réforme ? Me A.E.K.B. : Absolument, la loi 95-17 est une réforme judiciaire incontournable, qui va sans doute résoudre tous les problèmes dont souffre la juridiction étatique, notam- ment la lenteur des procédures, la divulga- tion des faits par les médias et les réseaux sociaux.

Par ailleurs, les tribunaux recourent à un critère essentiellement économique pour qualifier l'arbitrage d'international. Toute transaction impliquant un flux transfrontalier de biens, de personnes, de fonds ou de services sera éligible à l'arbitrage international. Qualifier l'arbi- trage d'international a plusieurs consé- quences, car le système d'arbitrage

L’arbitrage joue un rôle important dans la créa- tion des valeurs ajoutées en matière d’investis- sement et l’instauration d’une assurance cer- taine aux investisseurs étrangers.

international diffère du système d'arbitrage national. Selon les normes internationales, notamment la loi type de la Commission des Nations unies pour le droit commercial international (CNUDCI) de l’ONU, l'arbitrage international est le résultat d'un litige dans un contrat économique international. F.N.H. : Selon vous, cette nouvelle loi va-t-elle renforcer l’engoue- ment des investisseurs pour les modes alternatifs de règlement des conflits ? Me A.E.K.B. : L’arbitrage joue un rôle important dans la création de valeur ajoutée en matière d’investissement et l’instauration d’une assurance certaine aux investisseurs étrangers, vu que ce genre de mode alter- natif est la volonté des parties, par laquelle elle désigne le tribunal ou le centre arbitral ainsi que les arbitres convenant à la nature de leur litige et la fixation du droit applicable. L'arbitrage en matière d'investissement est une procédure de règlement des différends entre investisseurs étrangers et pays d'ac- cueil (également appelée règlement des différends entre investisseurs et États). La possibilité pour un investisseur étranger de poursuivre un pays d'accueil est une garan- tie pour lui. F.N.H. : Aussi, devra-t-elle étendre le champ d’application de l’arbitrage ? Comment ? Me A.E.K.B. : A présent, l’arbitrage statue sur tous les litiges commerciaux et civils et peut s’étendre aux différends diplomatiques et politiques, comme c’est le cas pour la Cour internationale de résolution des diffé- rends «Incodir» basée à Londres. Celle-ci a pu intervenir en tant qu’incitateur de paix auprès de certaines zones, comme le cas du

Soudan où la Cour internationale a adressé aux parties prenantes du Soudan une lettre pour être désignée en tant que médiateur pour trouver une issue à leur impasse. Le tribunal arbitral rend une sentence qui lie les parties, sous certaines conditions. Ainsi, l'arbitrage permet de régler le litige, de sorte que la sentence arbitrale a autorité de l'ordonnance rendue dans la législation moderne. Et la décision rendue par l'ins- tance arbitrale est considérée comme un acte du pouvoir judiciaire, mais elle ne jouit pas du pouvoir exécutif comme c’est le cas dans la justice publique, à moins qu'il ne lui soit annexé la partie du président de la juridiction compétente. F.N.H. : Depuis des années, le Maroc s’est inscrit dans une politique d’ou- verture dans ses relations écono- miques. En quoi cette loi va-t-elle améliorer l’investissement et le cli- mat des affaires de manière plus générale ? Me A.E.K.B. : Evidemment, le Maroc a connu depuis ces dernières années une ouverture sur l’économie étrangère. Pourtant, les investissements internationaux expliquent le manque de régulation institu- tionnelle en la matière, comme dans le cas du commerce international via l'intervention de l'Organisation mondiale du commerce. La qualité des normes interétatiques dans un secteur d'investissement étranger accroît le pouvoir d'arbitrage dans son rôle de véri- table régulateur. De là, le tribunal arbitral vient dissiper les craintes des investisseurs étrangers, car il existe un lien entre l'arbi- trage et les flux de capitaux. Le consentement à l'arbitrage en matière d'investissement peut être trouvé dans les

accords d'investissement conclus directe- ment entre le pays et l'investisseur étranger, ou il peut être contenu dans la législation nationale du pays d'accueil, comme la légis- lation minière ou la législation sur l'inves- tissement. La CNUCED tient à jour une liste de la grande majorité des instruments prévoyant le consentement du pays hôte à l'arbitrage en matière d'investissement, qui doit être consultée au début de tout diffé- rend potentiel pour voir si un investissement peut être envisagé. Toutefois, les risques d'investissement comprennent la mauvaise foi des parties. Par exemple, la répartition inéquitable des bénéfices, la violation des secrets commer- ciaux par une partie et l'utilisation d'informa- tions confidentielles au profit de l'individu. Par conséquent, nous constatons que la plupart des investisseurs étrangers veulent, lors de la conclusion du contrat d'investis- sement, recourir en cas de litige à l'arbi- trage international pour obtenir protection et garantie juridiques. Pourquoi l'arbitrage est-il choisi plutôt que le contentieux devant les tribunaux étatiques ? Et bien parce que la procédure arbitrale est plus fluide. Elle se caractérise par la confidentialité dans les traitements des litiges, la compétence des arbitres, la rapidité d'exécution des procès et des sentences; en plus l'investisseur aura une assurance en cas de traitement de ses litiges. Par ailleurs, les protections les plus courantes accordées aux investisseurs étrangers, et pour lesquelles il existe une quantité importante de jurisprudence en matière d'arbitrage accessible au public, comprennent la protection contre l'expro- priation, la garantie d'un traitement honnête et équitable, le traitement national et le libre transfert de fonds. ◆

La loi 95-17 est une

réforme judi- ciaire incon- tournable, qui va sans doute résoudre tous les problèmes dont souffre la juridiction étatique.

Made with FlippingBook flipbook maker