Finances News Hebdo N° 1071

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JEUDI 30 JUIN 2022 FINANCES NEWS HEBDO

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◆ Badr Bellaj, co-fondateur marocain de l’entreprise «Mchain», nous commente la récente annonce faite par le wali de Bank Al-Maghrib sur la réglementation de l’usage des cryptomonnaies au Maroc. Tour d’horizon. Le Maroc fait son premier pas Cryptomonnaies

F.N.H. : Selon vous, est- ce que la régulation des crypto-actifs est une urgence aujourd’hui ? B. B. : Oui, c'est quelque chose de très urgent parce qu'au Maroc il y a une réelle adoption et un usage massif des crypto- monnaies. Le Maroc est classé 24 ème en volume à l'internatio- nal, et donc c'est important de cadrer ce domaine. On a même vu le dernier communiqué qui était en quelque sorte un rap- pel du premier sorti en 2017. Ce deuxième rappel montre que les autorités sont conscientes que nous sommes devant un phénomène qui est très répan- du au Maroc. Par conséquent, il faut avoir une réglementation pour protéger les utilisateurs contre les risques, à savoir les arnaques, les scams, et les activités illicites. Nous espérons que la régle- mentation ne sera pas juste une reproduction de la situa- tion actuelle, c'est-à-dire de l'interdiction tout court. Nous aimerions bien avoir un cadre légal bien clair, qui définit ce que sont les cryptomonnaies, les champs de l’utilisation, ainsi que les canaux d'utilisa- tion, etc. F.N.H. : Que peuvent apporter le FMI et la Banque mondiale dans la mise en place de ce cadre ? B. B. : La Banque mondiale

Propos recueillis par K. A.

Finances News Hebdo : Lors de sa dernière sor- tie médiatique, le wali de Bank Al-Maghrib a annoncé qu’un projet de loi sur les cryptomon- naies serait en cours d’élaboration avec le FMI. Quel commentaire en faites-vous ? Badr Bellaj : J’ai reçu l'an- nonce faite par Abdellatif Jouahri avec beaucoup d'in- térêt parce qu’auparavant, nous avions juste des rumeurs qui circulaient autour d'une potentielle réglementation. Même les précédentes sorties dans ce sens n'ont pas vrai- ment indiqué de quoi il s'agis- sait. Mais là, pour la première fois, un responsable de haut niveau dit clairement qu’on est en train de finaliser un projet de loi. Aujourd’hui, la situation est très intéressante dans la mesure où le Maroc devrait trancher sur l'interdiction ou l'autorisation des cryptoactifs. Avoir un cadre légal qui régle- mente les cryptomonnaies est un premier pas sur lequel on peut bâtir d'autres initiatives. Ce projet de loi va en quelque sorte lancer le débat autour de la thématique, tout en enri- chissant les discussions parmi les professionnels pour sortir avec une version finale de la loi qui va satisfaire tout le monde.

F.N.H. : Peut-on voir l’émer- gence d’un stablecoin de la Banque centrale à terme ? B. B. : Personnellement, je pense qu'on assistera à l'émergence du statu quo entre la Banque cen- trale et les banques privées pour ce qu'on appelle le «Wholesale CBDC» (Central Bank Digital Currency ou monnaie digitale de la Banque centrale) pour les transferts interbancaires. D'ici deux à trois ans, je pense qu’on pourra voir une initiative dans ce sens-là. Il faut rappeler que la CBDC est indépendante du projet de loi qui règlemente les crypto- monnaies. Il s’agit de la transition vers le e-Dirham, une monnaie virtuelle adossée à une monnaie classique telle que le Dirham. F.N.H. : En plus du cadre légal, qu’est-ce qu’il faut pour développer cette industrie des cryptoactifs au Maroc ? B. B. : En plus du cadre légal,

et le FMI peuvent apporter leur expertise en matière réglementaire dans la gestion des cryptomonnaies dans le monde. Mais ces deux enti- tés ont des avis tranchés sur la question. Récemment, le FMI a recom- mandé au Salvador de ne pas adopter le Bitcoin comme monnaie officielle. Après son adoption, l’organisation internationale a de nouveau appelé le pays à renoncer à cette décision. C’est dire que ces deux enti- tés campent sur leur posi- tion. Nous espérons que leur contribution sera juste tech- nique, c'est-à-dire dans les aspects relations entre les cryptoactifs et les canaux financiers classiques. Et ce, sans mettre des bâtons dans les roues pour influencer cette loi d’une manière ou d’une autre.

Au 16 juin 2022, il existe 19.893 cryp- toactifs, ou cryptomon- naies, pour une valeur de 941,7 milliards d'euros.

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