FNH N° 1025

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ECONOMIE

JEUDI 3 JUIN 2021 FINANCES NEWS HEBDO

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F.N.H. : A quoi peut-on attribuer ces retards-là : les restrictions ou la hausse des contamina- tions au niveau des tribunaux ? A. S. : Durant la phase 1, les retards s'expliquaient par la non-tenue des audiences. Durant la phase 2, les retards étaient dus à la hausse des contami-

nations touchant des magistrats et des greffiers, ce qui a incon- testablement impacté le rythme de fonctionnement des tribunaux en raison justement de l'absence momentanée desdits magistrats et greffiers. F.N.H. : Quels sont les types de dossiers qui sont les plus suspendus ?

Devant la forte pro- pagation du virus au sein des juri- dictions, plusieurs d'entre elles ont été momentanément fermées.

A. S. : Durant la phase 1 de suspension des audiences, tous les dossiers étaient à l'arrêt, sous réserve des dossiers concernant des personnes poursuivies en état de détention, des dossiers en référé et des dossiers d’instruction. Durant la phase 2 de l'épidémie, qua- siment toutes les juridictions ont été impactées, indépendamment de la nature des dossiers. Je ne pense pas que la Covid-19 ait touché différemment les différentes juridictions. Néanmoins, il est vrai que plus la juridiction était grande et accueillait beaucoup de per- sonnes, plus la contamination pouvait se propager davantage et impacter plus fortement ladite juridiction. F.N.H. : Quel impact auront ces retards d’un point de vue social ou encore économique ? A. S. : Il est certain que les retards accusés dans le traitement des dos- siers ont eu un impact sur le plan social et économique. Les opérateurs économiques qui attendaient l'exécu- tion des décisions favorables, d'ores et déjà obtenues, ou qui attendaient la condamnation de leurs débiteurs, ont dû patienter jusqu'à la reprise des audiences. Il en est de même des par- ticuliers qui attendaient la condamna- tion de leurs locataires, ou encore les salariés licenciés qui souhaitaient faire condamner leurs employeurs en vue du paiement de leurs indemnités de licen- ciement. Les victimes d'accidents de travail ou d'accidents de la circulation ont dû aussi attendre la reprise d'un fonctionnement normal des juridic-

tions. Il ne faut pas oublier non plus les dossiers relatifs à la pension alimen- taire des enfants et à leur garde. Les retards accusés dans le traitement des dossiers a certainement eu un impact social et économique. F.N.H. : Quelles sont les solu- tions mises en place pour remé- dier aux retards de traitement des dossiers ? A. S. : Je pense que la réduction des contaminations ayant accompa- gné le démarrage de la campagne de vaccination a eu pour conséquence la reprise d'un fonctionnement quasi- normal des juridictions. Cela a donc permis d'absorber une grande par- tie du retard accusé lors des mois précédents. Aussi, actuellement, les reports d'audiences au niveau du tribu- nal de commerce sont de deux à trois semaines et au niveau du tribunal de première instance de Casablanca, par exemple, ils sont généralement d'une, voire de deux semaines, ce qui est rai- sonnable pour les justiciables. F.N.H. : Les procès à distance donnent-ils des résultats pro- bants ou pas ? Pourquoi ? A. S. : Il est évident que la tenue des procès à distance en matière pénale a permis de maintenir le traitement des dossiers, notamment ceux des per- sonnes poursuivies en état de déten- tion. Je pense que cette crise sanitaire

est un tournant dans le développement du digital dans tous les domaines, y compris en matière judiciaire. D'ailleurs, il n'y a pas de raison qu'il y ait un retour en arrière après la fin de l'épidémie. Au contraire, cette nouvelle tendance de digitalisation ne peut que conti- nuer, voire s'accélérer. Pour certaines matières où la procédure est écrite, je suis d'avis que le procès virtuel devrait, à l'avenir, constituer la règle. Sauf pour certains cas particuliers, je pense qu'un procès à distance devrait être privilégié (en matière commerciale notamment). Il n'y a pas de raisons à tenir physi- quement un procès et faire déplacer plusieurs intervenants pour s'échanger des conclusions écrites pouvant par- faitement être envoyées de manière électronique. D'autant plus que le Maroc dispose qu'un cadre légal régissant l'échange électronique de données. D'ailleurs, le ministère de la Justice déploie d'im- portants efforts en vue de la numéri- sation du procès et de la digitalisa- tion de la justice. Il va sans dire que dans d'autres juridictions, les procès sont tenus à distance et la justice ne requiert plus de présence physique pour certaines matières. Bien entendu, cela suppose qu'il y ait un écosystème global incluant tous les intervenants (juridictions, avocats, experts, etc.). Le Maroc ne pourra que s'orienter vers une digitalisation de plus en plus forte de la justice. ◆

Dans cer- taines juri- dictions, les procès sont tenus à distance et la justice ne requiert plus de pré- sence phy- sique pour certaines matières.

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