FNH N° 1081

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ECONOMIE

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 20 OCTOBRE 2022

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F.N.H. : Le haut-commissariat au Plan (HCP) a révélé récemment dans une note qu'environ 3,2 millions de personnes supplémentaires ont basculé dans la pauvreté (1,15 mil- lion) ou dans la vulnérabilité (2,05 millions) sous les effets combinés de la crise sanitaire liée au covid- 19 et de l'inflation. Que pensez- vous de ces nouveaux chiffres ? N. A. : Cette étude du HCP est d’autant plus intéressante qu’elle montre que l’impact de l’inflation entre janvier et juillet 2022 a été plus fort sur la dété- rioration de la pauvreté et de la vulné- rabilité (autour de 55%) que celui des effets de la Covid-19 (45%). Ces chiffres confortent l’accélération de la dégra- dation du niveau de vie de la population. L’autre intérêt de la nouvelle publication du HCP tient au fait que celle-ci mesure à la fois la baisse du niveau de vie, l’aggravation des inégalités et l’accroissement de la pau- vreté et de la vulnérabilité. Il ressort entre autres du document du HCP que le monde rural a subi davantage la baisse du niveau de vie que le milieu urbain. A cela, il faudrait ajouter que le quintile inférieur, c’est-à-dire les 20% de la population ayant les revenus les plus faibles ont subi une baisse plus forte du niveau de vie et du pouvoir d’achat que les 20% possédant les revenus les plus élevés. En clair, les quelques progrès réalisés au cours des dernières années, notamment depuis 2014, ont été gommés par le bas- culement de 3,2 millions de personnes supplémentaires dans la pauvreté ou dans la vulnérabilité. Ce qui signifie quelque part un retour en arrière sur le front social. Au-delà du constat, il est urgent d’aller au fond des choses afin de comprendre pour- quoi l’inflation dégrade à ce point le niveau de vie de la population. D’où la nécessité d’organiser des débats publics à même de faciliter la compréhension de l’origine du problème. En définitive, plusieurs actions prouvent que le gouvernement est plus attentif aux doléances du patronat qu’aux préoccu- pations du consommateur. L’exécutif est insensible et passif depuis des mois face à la hausse des prix des carburants. Or, tout le monde sait que l’inexistence d’une structure de raffinage, notamment la Samir, contribue à la cherté du litre de carburant (autour de 3 à 4 DH de plus). Nous avons affaire à un gouvernement du patronat. Ce dernier a le plus bénéficié des mesures prises dans le cadre de la LF 2022. ◆

Pour Akesbi, la hausse du taux

directeur est d’au- tant plus inoppor- tune que l’économie marocaine n’est pas en surchauffe.

tionniste externe pour fixer des niveaux de prix reflétant davantage des phéno- mènes d’entente d’opérateurs et de domi- nation du marché que la hausse des prix à l’international. Aujourd’hui, le tourbillon inflationniste qui existe est lié davantage aux dysfonctionnements de l’économie de marché qu’à autre chose. La libéralisation n’a pas tenu ses promesses au Maroc. Elle était censée instaurer la multiplicité des acteurs, garantir la concurrence et tirer les prix à la baisse. Aujourd’hui, c’est le contraire qui se produit avec la hausse généralisée des prix. Nous n’avons une économie de marché que de nom, car les ressorts de celui-ci sont inexistants. F.N.H. : BAM a décidé de resserrer sa politique monétaire en augmen- tant le taux directeur de 50 points de base dans l’optique de tempé- rer les poussées inflationnistes. Selon vous, cette décision est-elle opportune au regard de la situa- tion économique qui prévaut ? N. A. : Dans le meilleur des cas, la mesure dont vous faites allusion est un coup d’épée dans l’eau. Au pire des cas, celle-ci sera préjudiciable aux TPME. La hausse du taux directeur est d’autant plus inopportune que l’économie marocaine n’est pas en surchauffe. Bien au contraire, celle-ci devrait enregistrer un faible taux de croissance qui risque d’être inférieur à 1% du PIB en 2022. Concrètement, l’économie nationale affiche tous les signes d’une situation de stagflation, laquelle se caractérise par un taux d’inflation élevé, couplé à une crois-

sance molle, en ralentissement. Dans le schéma classique, une Banque centrale utilise la hausse des taux afin de refroidir l’économie en surchauffe. Dans le cas de figure actuel où l’économie nationale est déjà froide, est-il recommandable de la refroidir davantage par le truchement de la politique monétaire ? A l’évidence, la réponse est non. Je pense que BAM se trompe de diagnos- tic et prend une décision inappropriée pour régler le problème. Comme précisé plus haut, dans le meilleur des cas, la hausse du taux directeur est un coup d’épée dans l’eau, car les mécanismes de transmission de la hausse ou de la baisse des taux d’intérêt entre BAM et les banques ne fonctionnement pas comme il se doit. Il est peu plausible que les banques répercutent la hausse du taux directeur, puisqu’elles ne sont pas assail- lies de demandes de crédit. Dans le cas de figure d’une répercussion de la hausse du taux directeur, il est clair que ce sont les TPME déjà fragilisées par le contexte économique défavorable, qui feront les frais du renchérissement du cré- dit bancaire. Pour leur part, les grandes entreprises ont l’assise financière leur per- mettant de négocier leurs taux de crédit bancaire. En fin de compte, BAM est engluée dans la logique de la doxa finan- cière internationale. A partir du moment où la FED et la BCE ont décidé d’augmenter leurs taux d’intérêt, nous avons l’impres- sion que BAM s’est sentie obligée d’adop- ter par mimétisme les mêmes décisions, alors que la réalité économique du Maroc est totalement différente.

Les quelques progrès réali- sés au cours des dernières années, notamment depuis 2014, ont été gom- més par le bascule- ment de 3,2 millions de personnes supplémen- taires dans la pauvreté ou dans la vul- nérabilité.

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