FNH N° 1091

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JEUDI 12 JANVIER 2023

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surpeuplement de 156,17%. L’OMP souligne par ailleurs que ce phénomène, qui observe depuis plusieurs années déjà une tendance haussière, suite notamment aux multiples cas de déten- tion préventive, touche la majorité des régions du Maroc, notant que cer- taines sont plus exposées que d’autres. C’est parti- culièrement le cas de la région Marrakech-Safi, qui est la plus affectée au niveau national, avec un taux de surpopula- tion carcérale de 154,31%. En revanche, seules 4 régions du Royaume présentent un taux d’occupation en dessous de 100%, à savoir Laâyoune- Sakia El Hamra (77,78%), Tanger-Tétouan-Al Hoceima (80,33%), l’Oriental (96,88%) et Drâa-Tafilalet (99,63%). Un coup de grâce à la pré- somption d’innocence En plus de contribuer à l’in- flation carcérale, la déten- tion préventive est considé- rée comme une atteinte à la présomption d’innocence. «Malgré les efforts du minis- tère public, notamment à tra- vers de multiples circulaires visant à rationaliser la déten- tion préventive, la lutte contre le recours important à cette mesure privative de liberté reste nécessaire pour une meilleure protection des droits et des libertés et un désengor- gement des institutions carcé- rales. Toujours dans le volet protection des droits et des libertés, la détention préven- tive est pour beaucoup une limitation au principe de pré- somption d’innocence, mais le ministère public semble sou- tenir à travers les statistiques fournies que les décisions prises étaient fondées, prou- vant son efficacité» , insiste Me Roudane. Pour aller de l'avant en matière de rationalisation de la déten- tion préventive, le ministère public assure qu’il est «indis-

La détention pré- ventive est consi- dérée par plusieurs observateurs comme une atteinte à la présomption d’innocence.

blèmes en lien avec la déten- tion préventive. Il a dans ce sens précisé que la nouvelle réforme du Code pénal, en cours de finalisation, imposera aux procureurs de se justifier au cas où ils décident de déte- nir des suspects. Mesures alternatives : Une urgence pressante «Les alternatives à la détention provisoire sont, en effet, une bonne solution afin d’alléger le nombre de personnes déte- nues et préserver les droits et libertés des citoyens. Ces alternatives sont attendues depuis plusieurs années et elles devraient être introduites à l’occasion de la réforme en cours, même s’il existe tou- jours un débat quant à leur inclusion dans le code de procédure pénale ou l’adop- tion d’une loi autonome les concernant. La mise en place et l’application de mesures alternatives adaptées en fonc- tion des infractions permettrait de moins recourir à la déten- tion provisoire et donc réduire le nombre de personnes déte- nues» , analyse Me Roudane. Et de poursuivre : «Le projet de loi modifiant et complétant la loi n°22.01 sur la procédure pénale dispose des mesures

pensable d’accélérer l’intro- duction de réformes législa- tives qui offrent des alterna- tives à cette mesure. Des alter- natives efficaces et adaptées à l’environnement national» , lit-on dans le rapport. «Dans le cadre de la réforme des textes coercitifs, il serait judicieux de prévoir l’exclusion de l’application de la détention provisoire pour un certain type d’infractions ou de préciser les conditions qui justifieraient un tel recours (crimes financiers ou relatifs au code de la route par exemple). Et dans tous les cas de figure, une ana- lyse in concreto, au cas par cas, permettrait d’identifier individuellement et prendre en compte la dangerosité des faits commis et les probabili- tés de fuite lors de la période d’instruction de l’affaire. La durée de la détention provi- soire se doit également d’être plus variable et adaptée aux infractions concernées», pré- cise l’avocate. Il y a un an, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, avait indiqué, dans sa réponse à une question à la Chambre des représentants, que la mise en place de peines alternatives ne manquera certainement pas de résoudre les multiples pro-

afin de rationaliser le recours à la détention provisoire. Les mesures alternatives les plus reconnues et qu'il serait judi- cieux d’instaurer, sont l’assi- gnation à résidence sous sur- veillance électronique (avec les bracelets électroniques), les travaux d’intérêt général, ou encore la libération sous caution appliquée de manière plus cohérente. Ces mesures permettent d’avoir une cer- taine force coercitive sans pour autant recourir à la détention, et donc augmenter le nombre de personnes déte- nues. L’enjeu de la mise en place de ces mesures alterna- tives au Maroc est leur bonne application. Cela doit donc s’accompagner de moyens matériels et financiers suffi- sants, sans oublier l’élément humain» , conclut-elle. Outre l’introduction de mesures alternatives, la pré- sidence du ministère public souligne l’urgence de renfor- cer les ressources humaines judiciaires, notamment au niveau des Cours d’appel, en vue d’améliorer les délais de traitement des instructions judiciaires. D’ailleurs, le rap- port d’activité de ladite organi- sation a fait ressortir un besoin d’environ mille magistrats. ◆

Les établisse- ments péni- tentiaires du Royaume ont enregistré à fin 2021 un taux de sur- peuplement de 156,17%. Ce phénomène connait une tendance haussière, depuis plu- sieurs années, suite notam- ment au recours accru à la détention préventive.

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