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SOCIÉTÉ DU 26/27/28/29/30 MARS 2020 FINANCES NEWS HEBDO

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En ces temps de confinement, nous avons demandé à des citoyens (nes) de nous dire comment ils vivent cette situation particulière. Confessions. Témoignages Aziza, psychologue clinicienne

“P arler du confinement imposé en ces temps difficiles m’a fait prendre conscience de la dimension symbolique d’être enfermée pour ma propre santé et celle d’autrui. Jamais le fait d’être à l’intérieur de ma bulle n’a été aussi impactant et aussi dur. Les choses sont allées crescendo. Quand les mesures de restriction ont commencé à se compliquer et que les écoles ont fermé, j’étais à Tétouan avec la famille et j’angoissais terriblement à l’idée d’être coincée loin de mon antre et de mon espace. Je n’ai respiré qu’une fois chez moi dans mon cocon. J’ai dû aussitôt fermé mon cabinet pour une durée indéterminée ainsi que les institutions où je suis vacataire, gérer le suivi de mes patients de loin, assurer les patients de ma dis- ponibilité et en même temps essayer, via les réseaux sociaux, de répandre de la joie et de poster des choses colorées et amusantes ainsi que des conseils pour les

parents en détresse à la maison. Et cela a réussi avec certaines amies nous nous sommes amusées à rigoler et à prendre les choses à la légère. Ça a duré un petit moment puis l’angoisse s’est emparée de moi et j’ai dû prendre du recul avec les réseaux sociaux , mes prises en charge, et me recentrer sur moi parce qu’on ne peut donner de soi si on ne s’est pas donné à soi. Nous aussi les soignants psy sommes des êtres humains. On nous demande d’être là, de soutenir et nous le faisons du mieux possible. Mais nous devons faire face également à nos propres zones d’ombre, les accepter et surtout, comme l’a dit Don Miguel Ruiz (auteur mexicain et chamane, ndlr) dans son 4 ème accord, «faire de notre mieux». J’ai aidé là où j’ai pu, soutenu qui j’ai pu, puis je me suis tournée vers mes amies, mes proches, les moins proches. Je pense aussi à ce qui s’est passé samedi soir : les manifestations dans la rue qui sont le fruit de la peur, de l’ignorance et de la

précarité. Je demande à tout le monde de faire preuve de compassion et de bienveillance. Certes, ces gens- là sont sortis de manière organisée, mais derrière il y a la peur, l’angoisse et la précarité. J’ai la chance de pouvoir être confinée dans de bonnes conditions. Ce n’est pas le cas de tout le monde, alors aidons nous les uns les autres comme nous pouvons. J’espère que quand ça sera fini, on se souviendra que le plus impor- tant est la manière dont nous nous sommes serrés les coudes et que l’éducation et la santé sont vitales mais non plus primordiales. J’espère aussi qu’on se souviendra que, pendant que nous faisions face à nos obscurités et peur, la Terre a respiré, la pluie que nous n’attendions plus est tombée, les animaux sont reve- nus repeupler leurs espaces et, pendant une période, les êtres humains sont devenus plus solidaires et plus conscients de la nécessité de vivre sur une terre res- pectée et nourrie. ◆

Ihsane, écrivaine et poétesse

Ahmed, militant associatif

L es mesures de confinement obligatoire ne semblent pas plaire à tout le monde au Maroc. Tout d’abord, une grande partie de la population vivant au jour le jour, s’est retrouvée sans le moindre sou du jour au lendemain, ne disposant pas de revenu fixe ni de sécu- rité sociale. Qui peut leur en vouloir finalement de ne pas respecter la mise en quarantaine ? Ces gens-là risquent de mourir de faim si l’Etat n’intervient pas pour leur venir en aide d’urgence. Une autre catégorie de personnes n’est pas prête à respecter les mesures de confinement par pur fatalisme. Ces personnes craignent tellement la mort qu’elles refusent de se plier aux règles entreprises pour limiter la pandémie. Elles préfèrent recourir à la religion, quitte à être touchées par la maladie, puisque, selon elles, c’est Dieu qui protège et qui ôte la vie… D’autres se rebellent par égoïsme, ignorance ou encore insouciance… Dans tous les cas, l’Etat devrait mettre en place des aides aux plus démunis y compris les sans-papiers et les SDF. Nous ne pouvons pas les laisser mourir simplement pour notre survie. Certes, les mesures doivent être respectées pour sauver notre pays, mais il est grand temps de penser aux autres. L’élite marocaine ne représente pas à elle seule le Maroc. Dernière question à se poser et qui mérite une profonde réflexion de chacun (e) d’entre nous : et si le Covid-19 était finalement la revanche de notre planète face à tout le mal que l’humanité a commis ? Et s’il était temps de corriger tous les maux de notre société et de nous reconstruire ? Unissons-nous face à la pandémie, respectons le confi- nement obligatoire dans la mesure du possible, et surtout, profitons de cette phase pour nous remettre en question et évoluer. ◆

P remiers jours de confinement…mon quartier plutôt «classe moyenne» entre en «hibernation». Les consignes sont respectées et, de ma fenêtre, j’observe la rue prendre les allures du mois de Ramadan, quelques minutes avant le Ftour… Quant à moi qui suis plutôt du genre hyper actif, j’avoue que j’ai un peu angoissé et puis mon esprit «combattant» a repris le dessus. Je me suis fixé une règle de vie en mode confinement : prendre du temps pour m’occuper des miens, pour réfléchir, lire et écrire, et faire un peu de sport sur la ter- rasse commune où chaque locataire possède son box. Mais la majeure partie de mon temps, je veux le passer à apporter ma pierre au combat contre le virus, c’est-à-dire maintenir le lien avec les autres, essayer de venir en aide à ceux qui en ont besoin, diffuser les bonnes infos et les consignes des autorités sanitaires, maintenir le contact avec les associations de jeunes avec lesquelles je travaille au quotidien. Bref…faire ce que je sais faire le mieux : militer ! Les réseaux sociaux, le virtuel sont devenus pour quelque temps ce qui rem- place notre réel, utilisons-les au mieux, ils renferment des trésors d’opportu- nités. Avec les jeunes militants associatifs et une trentaine de personnalités engagées, nous avons lancé le Groupe «Volontaires et Solidaires», devenu en quelques heures un immense espace de vie, de dialogue, d’infos et de solidarité… Nous avons fait partie de ceux qui ont lancé l’action «Tous aux fenêtres» ce samedi 21, où nous avons chanté l’hymne national et applaudi nos soignants et tous ceux qui veillent sur nous. Nous avons plein d’idées, plein de projets, rejoignez-nous sur Facebook et vous verrez que le confine- ment en plus de protéger notre vie et celle des autres, est aussi un moment propice au dépassement de soi… Force et courage à tous ! ◆

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