FNH N° 1017

31

SOCIÉTÉ

FINANCES NEWS HEBDO

MERCREDI 31 MARS 2021

www.fnh.ma

La plume, un exutoire ? ◆ Inspirée par Docteur Quinn, femme médecin, cette série américaine scellera définitivement le choix d’Intissar Haddiya de devenir médecin. ◆ La volonté d’aller jusqu’au bout de ses rêves fait de notre néphrologue une femme accomplie, pas- sionnée d’écriture.

traités par hémodialyse, et ce chiffre augmente quotidiennement, et représente un véritable défi pour notre système de santé. Avec l’avè- nement de la pandémie Covid-19, la mortalité rapportée chez les patients dialysés est parti- culièrement élevée, et résulte principalement de la haute prévalence des comorbidités, qui sont associées à un mauvais pronostic au cours de la maladie rénale, telles que les com- plications cardiovasculaires et le diabète. Il est à noter que les patients recevant une hémodialyse en centre se présentent généra- lement dans un établissement de soins ambu- latoires deux à trois fois par semaine pour bénéficier d’une dialyse. Cela limite leur capa- cité à observer l'isolement physique requis pour le contrôle de l’infection Covid-19. La société marocaine de néphrologie avait dif- fusé des recommandations à l’intention des néphrologues et du personnel soignant pour la prise en charge des patients en dialyse. Celles-ci avaient concerné l’organisation des soins dans les unités de dialyse en respectant les règles de distanciation entre les patients, à la fois pendant les séances de dialyse et dans les zones d'attente, l’application des mesures barrières et les équipements de protection per- sonnelle ainsi que les conditions de transport des patients. Grâce à ces recommandations, la prise en charge des patients dialysés au cours de la pandémie était particulièrement bien maî- trisée dans notre pays. F.N.H. : S’il n’y avait pas Intissar Haddiya, femme médecin, il n’y aurait certainement pas la femme écrivaine que vous êtes aujourd’hui. Votre métier, par la force des choses, est celui de la communication et du par- tage. Parlez-nous de cette corrélation néphrologue-auteure ? Pr I.H. : J’écris depuis très longtemps, avant même d’avoir entamé des études de méde- cine. C’est une passion qui m’a accompagnée depuis longtemps. Mon écriture a certes beau- coup gagné en inspiration et en maturité du fait de mon exercice de médecin hospitalier. Vous savez, l’art de soigner, de soulager la douleur, être le réceptacle de la vulnérabi- lité humaine dans ses diverses composantes, confère à la longue un regard plus intense sur la vie et nombre d’interrogations surtout. J’estime qu’être médecin y est certes pour quelque chose dans la manière dont je traite, actuellement, les thématiques que j’aborde. Construire des personnages et tramer des intrigues requièrent un sens de l’observation et de l’analyse. On en trouve bien entendu dans les métiers de la santé, mais pas que… Un très grand nombre d’auteurs font une excellente analyse de la société dans leurs écrits sans

pour autant être médecin. Toutefois, l’histoire retient un certain nombre de médecins écrivains de renom. Qui n’a pas été marqué par Louis-Ferdinand Céline et son célébrissime «Voyage au bout de la nuit» ? Sir Arthur Conan Doyle ? L’Américain Robin Cook et bien d’autres… F.N.H. : Vous avez toujours eu un pen- chant aiguisé pour l’écriture. Votre soif pour la littérature a donné nais- sance à deux romans salués par la critique, «Si Dieu nous prête vie» et «l’inconnue». Vous avez même raflé le 1er prix spécial francophonie pour votre poème «Étincelles de vie». Que vous apporte l’écriture ? Pr I.H. : L’écriture est un fabuleux exercice de liberté, nourri de la sensibilité de l’auteur, de ses convictions et de ses expériences. En vers ou en prose, la littérature est un espace où tout est permis ou presque. On peut y donner libre cours à sa créativité, ses ressentis et se per- mettre, bien entendu, de véhiculer ses idées. Souvent, dans mes romans, il m’arrive d’être transportée par les personnages que j’ai créés et auxquels je m’attache longtemps, même après avoir achevé le manuscrit. Il m’arrive de réfléchir à certaines scènes de mes romans et imaginer d’autres dénouements possibles. Croyez-moi, ça forge l’imagination et élargit bien des horizons… F.N.H. : D’où puisez-vous cette inspira- tion ? Vous êtes en passe de terminer un 3ème roman, parlez-nous de cet ouvrage ? Pr I.H. : Je donne libre cours à ma plume et à mon imagination. Je raconte des évènements, des scènes de vie, inspirés de la société marocaine, si riche en contrastes, unique et plurielle dans le même temps. Le Maroc ,dans ses composantes les plus inattendues, ses dimensions les plus intrigantes, drôles ou dou- loureuses, est une source intarissable d’ins- piration. Mes écrits, c’est aussi une manière d’inviter à réfléchir sur certains sujets relatifs à notre marocanité commune, telles la place de la femme dans la famille, la société, les injustices, les inégalités et les pressions que subissent les moins nanties, ces petites gens souvent méconnues des architectes des lois et qui n’ont ni le privilège ni la capacité de porter leur voix. Concernant mon dernier roman, surprise ! Intitulé «Trahison pieuse», il sort prochaine- ment. Sous cet oxymore étrange, il y a une histoire poignante où se conjuguent trahison et pathologie psychiatrique sous d’effrayants dehors de bonté et de douceurs. Mes lecteurs pourront le découvrir très bientôt. ◆

I ntissar Haddiya allie merveilleusement bien la science à la littéra- ture. Ces deux univers sont passionnants, com- plexes et complémentaires. La plume lui sert de s’extérioriser et d’embellir le quotidien du lecteur. Son savoir scientifique, par contre, lui permet de sou- lager et sauver des vies. Pas facile d’exercer dans un milieu

hospitalier où la détresse humaine et la souffrance prennent large- ment le dessus, surtout que l’on sait que les mala- dies rénales tuent sans faire de bruit… Pourtant, c’est dans ce genre de situa- tions difficiles qu’elle parvient à panser les

Pour son troisième ouvrage intitulé «Trahison pieuse» , qui sortira prochainement, Intissar s’attaque à un autre registre : celui de l’intrigue. Rappelons que ses premiers essais littéraires ont été publiés en anglais par Cambridge University Press entre 1999 et 2005. Professeure de néphro- logie à la Faculté de médecine d’Oujda, Intissar Haddiya est également auteure de plusieurs travaux scientifiques médicaux, et est engagée dans la promo- tion du don d’organe. Mariée et mère de deux gar- çons, Intissar Hadiyya est également membre de l’Asso- ciation de soutien aux insuffi- sants rénaux d’Oujda et de la Fédération de développement des associations des insuffi- sants rénaux de l’Oriental. ◆

blessures des autres à travers l’écriture. Une façon de faire abstraction d’un quotidien difficile pour pénétrer dans le monde merveilleux de la fiction. La dimension humaine et réa- liste n’est jamais loin, à l’image de son roman «Si Dieu nous prête vie» sorti en 2016, qui traite justement la maladie d’in- suffisance rénale. Son penchant pour le social, la condition féminine, la kafala, l’héritage l’amène 3 ans plus tard à écrire un 2ème ouvrage intitulé «L’inconnue». Ce dernier vient d’être traduit en langue arabe pour toucher un plus large public. En 2017, son recueil «Au fil des songes» lui vaut le 1er prix spécial francophonie pour son poème «Etincelles de vie».

Made with FlippingBook flipbook maker