SAM allons 1_21_WEB

SAM ALLONS

01 | 2021

Des étrangers dans ma patrie De la moquerie à l’amour p. 4

Quitter sa patrie… arriver à la maison Tout quitter et faire confiance p. 11

Le long chemin Interview d’un réfugié p. 18

À LA MAISON

ÉDITORIAL

SOMMAIRE 02 Éditorial Christophe Reifsteck

Christophe Reifsteck Responsable du département Europe francophone

Où est ma patrie ? En 2020, avec la crise covid et à l’heure des confinements, beaucoup de nos collaborateurs ont été contraints au re- tour dans leur patrie. D’autre part pour la plupart d’entre nous, ici dans notre Europe individualiste, c’est un temps où l’on (re)découvre l’importance de la famille et de son chez-soi ! Bon an, mal an, c’est l’occasion donc de res- serrer les liens familiaux... mais que dire pour ceux qui considéraient la famille déjà comme un « confinement » ? En cette période si particulière, c’est l’occasion pour SAM global de se pencher sur ces notions et valeurs que repré- sentent la patrie, la famille, son « chez-soi » et de demander à nos collaborateurs et à leurs enfants comment ils vivent et comprennent ces choses : que pensent par exemple des enfants qui grandissent dans la patrie d’adoption de leurs parents et qui se sentent différents et peut-être étrangers lorsqu’ils découvrent leur pays d’origine. Il y a aussi ce- lui qui était chez lui, bien intégré et qui se retrouve « ex- patrié » dans son propre pays, rejeté et discriminé par sa famille et dans son village à cause de sa foi nouvelle en Jésus. Ou comment encore un nomade, sdf de nature, se sent chez lui ? Dans ce ALLONS, nous vous proposons un tour d’hori- zon de ces notions et valeurs qui souvent diffèrent selon le contexte culturel et géographique de chaque personne et pourtant se ressemblent tellement et se rejoignent fina- lement toutes autour de la famille et des amitiés. « ...C’est pourquoi je me mets à genoux devant Dieu le Père, de qui toute famille (patria en grec) reçoit son nom (son identité) dans les cieux et sur la terre. Éph 3.15 » Nouveau design du ALLONS Notre équipe de communication et en particulier Luisa Vonarburg, responsable du FOCUS et du ALLONS, nous proposent un design renouvelé et plus moderne de nos ma- gazines (notre site WEB suivra d’ici peu). Nous nous ré- jouissons de la nouvelle apparence de notre journal fran- cophone et espérons que cela va vous plaire.

03 Pris sur le vif Paul Verlaine

04 Des étrangers dans ma patrie Somaly B.

05 Question de définition Helen M.

06 Le foyer, mon chez-moi Chanthy K.

07 Le cœur ou le chapeau ? Mark Greenwood

08 Homebase

Beatrice Ritzmann & Jürg Pfister

11 Quitter sa patrie… arriver à la maison Naemi S.

Je vous souhaite une excellente lecture

12 Recette de cuisine Gitte D.

Christophe Reifsteck

02

PRIS SUR LE VIF

13 « Notre chez-nous » Des enfants nous disent…

L’amour de la Patrie

14 Retour au pays

Familles Keller & Leuenberger

L’amour de la Patrie est le premier amour Et le dernier amour après l’amour de Dieu. C’est un feu qui s’allume alors que luit le jour Où notre regard luit comme un céleste feu ;

16 En fuite

Rahel Strahm avec Mirjam

C’est le jour baptismal aux paupières divines De l’enfant, la rumeur de l’aurore aux oreilles Frais écloses, c’est l’air emplissant les poitrines En fleur, l’air printanier rempli d’odeurs vermeilles.

17 Est-ce qu’il existe une « patrie » ? Susanne Gisler

L’enfant grandit, il sent la terre sous ses pas Qui le porte, le berce, et, bonne, le nourrit, Et douce, désaltère encore ses repas D’une liqueur, délice et gloire de l’esprit.

18 Le long chemin P.H.

Puis l’enfant se fait homme ou devient jeune fille Et cependant que croît sa chair pleine de grâce, Son âme se répand par-delà la famille Et cherche une âme sœur, une chair qu’il enlace ;

19 #be sent

Postes vacants chez SAM global

Et quand il a trouvé cette âme et cette chair, Il naît d’autres enfants encore, fleurs de fleurs Qui germeront aussi le jardin jeune et cher [...]

22 Pouls financier Peter Röthlisberger

Extrait du poème de Paul Verlaine, 1844-1896

Page titre : Samuel T. travaille depuis juin 2019 dans le projet ProVIDA au Brésil.

Pour des raisons de sécurité, nous ne mentionnons pas les noms de fa- mille de nos collaborateurs à l’étranger.

03

chez-moi

LE FOYER,MON

LE FOYER – MON CHEZ-MOI

enfuie peu après chez notre grand- père, me laissant seule avec mes demi-sœurs. En grandissant, je vi- vais dans la peur constante de me faire maltraiter par mon beau-père. Presque chaque jour, il me battait, me fouettait et me tirait les che- veux. Le fardeau psychique était parfois si lourd que je ne pouvais presque pas aller à l’école – j’au- rais voulu ne pas être née. Je n’ai pas osé en parler à qui que ce soit, car j’avais peur de mon beau-père. Quand la famille allait à un ma- riage ou dans n’importe quel autre endroit, je devais rester pour garder la maison. Parfois je ne pouvais pas aller à l’école, je devais travailler et gagner de l’argent pour ma famille, mes frères et mes sœurs. Comme sa propre fille En 2009, ma cousine Somaly est de- venue cuisinière à Lighthouse Battam- bang. Elle a fait la connaissance du di- recteur Lukas, s’est éprise de lui et ils se sont mariés en 2010. La même année, Somaly et Lukas ont décidé de s’occu- per de moi et de ma situation. Je suis venue à Lighthouse Battambang pour habiter avec eux, et plus tard déména-

L’amour de ma cousine a radica- lement changé ma vie. Après une enfance difficile, je me suis réfu- giée à Lighthouse Battambang et j’y ai trouvé un chez-moi. Avant de venir à Lighthouse Battam- bang, je vivais avec ma mère. J’étais le cinquième enfant et la fille aînée de la famille. Mon père est mort lorsque j’avais deux ans. Ma mère s’est remariée trois ans plus tard et a eu trois autres enfants. J’ai donc cinq frères, une sœur biologique et trois demi-sœurs. J’étais chargée de m’occuper des trois fillettes. Ma mère et mon beau-père partaient parfois travailler en Thaïlande et nous confiaient à mes grands-parents pen- dant ce temps. Les coups, la peur et le silence Trois de mes frères et moi avons été choisis par un foyer d’enfants pour y loger et fréquenter l’école. Mais le jour où ils sont venus nous chercher, j’ai refusé de les accompagner parce que j’avais trop peur. Ma cousine Somaly est donc partie à ma place. Je suis res- tée à la maison et ma petite sœur s’est

Chanthy avec des étudiantes de Lighthouse Pursat

ger dans leur maison. Depuis lors, je fais partie de leur famille et ils prennent soin de moi comme de leur propre fille. Ils m’ont parlé du Dieu créateur et j’ai ap- pris beaucoup de choses de la Bible. Par le témoignage d’amour de mes « nou- veaux parents », j’ai décidé de croire en Jésus Christ. En plus, j’ai pu terminer la douzième classe. Depuis, je travaille pour Lighthouse Pursat et subviens à mes besoins. Rien de cela n’aurait été possible sans Lukas, Somaly et Dieu. J’en suis heureuse et reconnaissante !

Chanthy K. Co-direction de Lighthouse Pursat

De gauche à droite : Chanthorn (23), Chanthy (25), Devy (21)

06

QUITTER SA PATRIE… ARRIVER À LA MAISON

plus jamais. Seulement, les choses se sont passées autrement. Pour moi, partir en janvier 2016 n’était donc pas seulement quitter la maison et laisser tomber des choses familières, mais aussi revenir dans un endroit connu. J’ai rejoint une équipe que je connaissais déjà partiellement, j’étais passablement familiarisée avec la ville et ses environs et je pouvais parler deux ou trois phrases dans la langue locale. Je rencontrais sans cesse des visages familiers. Cela m’a permis de démar- rer plus facilement et je me suis rapidement sentie à l’aise avec le pays, les gens et la culture. Une décision de grande portée Avant la fin des deux ans, j’ai dû décider si je voulais rester plus longtemps ou rentrer en Suisse. L’équipe était devenue de plus en plus comme une famille, j’aimais beaucoup le tra- vail à l’école maternelle qui commençait tout juste à se déve- lopper. J’aimais les enfants de mon voisinage et j’ai pu nouer des amitiés avec des femmes du quartier. La décision de res- ter deux ans de plus n’a donc pas été très difficile à prendre. Entre-temps, j’ai déjà vécu cinq ans en Guinée. Malgré tous les défis et les revers, je crois toujours que c’est ma place pour le moment. J’ai en effet quitté mon pays d’origine, la Suisse, mais la Guinée est également devenue un (mon) foyer. Et quand on me demande si je resterais pour toujours, la ré- ponse guinéenne s’avère utile : « C’est Dieu qui connaît. »

Naemi Schelling vit en Guinée depuis cinq ans. En- seignante en maternelle, elle a laissé beaucoup de choses derrière elle et a ouvert son cœur à la nou- veauté. Lorsque j’ai effectué un court terme en 2012 avec Ac- tionVIVRE Nord en Guinée, je n’ai cessé de me demander si je pourrais m’imaginer vivre et travailler dans un pays du tiers monde pendant une période plus longue. C’est à ce mo- ment que j’ai lu le passage de Genèse 12.1 où Dieu appelle Abraham à aller dans un autre pays. Mon commentaire de lecture de la Bible disait : « Abraham s’est mis en route et a quitté la sécurité de son foyer et de sa résidence perma- nente. Il a entendu l’appel de Dieu et l’a suivi. » Par ce ver- set, Dieu m’a parlé d’une manière si claire que je suis partie quatre ans plus tard. Tout a un prix Mais ce n’était pas aussi simple que cela. Je m’étais bien ins- tallée en Suisse. Je vivais dans une colocation où je me sen- tais à l’aise et j’avais une place d’enseignante de maternelle, que j’aimais vraiment. Je participais également à un groupe de maison où j’apprenais beaucoup et où il y avait une bonne camaraderie. J’aimais passer du temps avec mes amies. J’ai versé quelques larmes en laissant mon travail, quittant la co- location et partant loin de ma famille et mes amis, mais je savais que c’était une bonne décision. J’ai donc commencé à me préparer à un engagement plus long. Je voulais partir pour deux ans, tout en pouvant m’imagi- ner rester plus longtemps. Ce que je ne savais pas à l’époque, pendant mon court terme, c’est que je repartirais avec SAM global pour la Guinée et que j’entrerais en plus dans le même projet. Je me souviens encore du jour où j’ai dit au revoir à mes étudiants d’anglais lors de mon premier départ en 2012 et où ils m’ont dit en riant : « Alors on se revoit dans deux ans. » Mais nous pensions tous que nous ne nous reverrions

Naemi S. Enseignante à l’école maternelle ActionVIVRE Nord

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EST-CE QU’IL EXISTE UNE « PATRIE » ?

De retour… arrivée ? Lors du retour définitif en Suisse quand j’avais 16 ans, les failles dans mon concept de la patrie se sont encore appro- fondies. Le sentiment d’être sans domicile fixe, sans appar- tenance et celui d’étrangeté se sont installés dans mon âme d’une manière très consciente et confuse. La question souvent posée : « Tu viens d’où ? » déclenchait beaucoup de choses en moi, parce qu’en fin de compte, avec elle se posait aussi le problème de l’identité et des racines. Il ne semblait pas y avoir de bonne réponse pour faire comprendre la richesse et la complexité de mes origines.

En tant qu’« Enfant de Troisième Culture (ETC 1 ) » , j’ai gran- di avec le sentiment que la patrie est un concept relatif. Qu’il n’en existe pas pour moi car la mienne est soumise à des chan- gements constants. La patrie est un concept que chaque personne ap- préhende à sa propre ma- nière : un échantillon de tissu coloré, tissé des di-

Photo d’enfance d’années lointaines : Susanne en 1985.

Nous sommes à la maison là où nous sommes ensemble, en famille.

verses influences de notre enfance, géographiques, cultu- relles, sociologiques ou spirituelles. La particularité du sen- timent d’appartenance d’un ETC repose sur le fait qu’il est souvent défini davantage par une affiliation personnelle que par une situation géographique. C’est ce qui en fait quelque chose de précieux et de fragile tout à la fois : la famille et les amis dans le pays d’engagement deviennent la « patrie mo- bile » - un endroit de sécurité et d’appartenance malgré les changements de lieux. Cela, je crois, donne aux ETC le don de pouvoir s’installer dans différents endroits du monde et de se sentir relativement rapidement chez eux. La grande question Quand nous sommes revenus dans le village indien après un an de séjour au pays, ma sœur a demandé à ma mère : « Où sommes-nous à la maison ? » Un silence a suivi. Ma mère nous a retourné la question. Après un moment, ma sœur a conclu : « Nous sommes à la maison là où nous sommes en- semble, en famille. » Lorsque j’ai été scolarisée à 7 ans dans un internat très loin de mes parents, ma compréhension du concept de patrie en a pâti. J’ai réalisé avec la clarté d’un enfant que la patrie est liée au mal du pays : aspiration à l’acceptation, la protection et une profonde sécurité. À 9 ans, j’ai mis en œuvre ce désir en souhaitant qu’on me donne le nom indien de « Coikwá ». Cela veut dire « ciel ». L’attribution de nom était un rituel très important dans le village indien dans lequel mes parents travaillaient. À l’époque, je ne m’imaginais pas encore com- bien le thème de la patrie allait imprégner ma vie, mes déci- sions et mes relations.

En tant qu’adulte, je me suis mise à la recherche d’une ré- ponse intérieure satisfaisante à la question de ma patrie. Le voyage m’a ramené à mon nom indien. J’ai réalisé que la pa- trie n’est pas seulement l’origine et le souvenir, mais signi- fie également le futur, l’espoir et le but. Bien que je n’aie pas trouvé d’endroit précis que je puisse définir comme ma pa- trie, j’ai pu découvrir un secret bien plus important. On lit dans le Psaume 91.9 : « Parce que toi tu as mis l’Eternel, mon refuge, le Très-Haut, pour ta demeure… » (version Darby). Cette demeure (patrie) divine promet un sentiment d’appar- tenance globale, qui n’est pas lié à un endroit précis et qui ré- siste à tous les changements. Le réaliser me rend plus légère et m’ancre profondément dans mon être ETC.

1 Un enfant qui grandit dans une culture différente de celle de ses parents.

Susanne Gisler Fille de Helene et Fredy Franz, elle a grandi au Brésil

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IMPRESSUM Rédaction Luisa Vonarburg, Madeleine Deriaz, Christophe Reifsteck Graphisme SAM global Luisa Vonarburg Impression Jordi SA, Belp Traduction A. Bolliger, C. Dentan, M. Deriaz, R. Gindroz, J-P. Habegger, J. Klinger, C. Reifsteck, J-M. Tapernoux Siège central SAM global, Wolfensbergstrasse 47, CH-8400 Winterthur Tél +41(0)52 269 04 69 CCP : 84-1706-5 IBAN : CH58 0900 0000 8400 1706 5 BIC : POFICHBEXXX Secrétariat romand SAM global, Impasse de Grangery 1, CH-1673 Ecublens Tél +41(0)24 420 33 23 Tél portable : + 41(0)76 565 81 20 ecublens@sam-global.org www.sam-global.org/fr Diffusion du SAM Allons 2 300 exemplaires / 4x par année Banques d’images Archives de SAM global unsplash.com Belgique SAM global, Rue Chapelle Emmanuel

Fête de RÉSERVEZ LA DATE

28 août 2021

Église « La Colline » Crissier de 9h30 à 17h00

envoyés! #be sent

SAM global est une organisation sans but lucratif, fondée en 1889. Avec de nombreux collaborateurs européens et locaux, SAM global fournit un travail de développement durable dans onze pays : Angola, Brésil, Burkina Faso, Cambodge, Cameroun, Chine, Guinée, Inde, Népal, Sri Lanka et Tchad. SAM global travaille dans le monde entier en collaboration avec des églises pro- testantes-évangéliques, des organisations partenaires locales et des œuvres de bienfaisance. De nombreux bénévoles s’engagent aussi pour ce travail.

SAM signifie Serve And Multiply (servir et multiplier) : nous désirons servir des gens de différentes cultures et religions dans leur intégralité, se- lon l’exemple que nous a laissé Jé- sus-Christ, afin qu’ils puissent faire l’expérience pratique de l’amour de Dieu, et la partager avec d’autres. Le siège principal se trouve à Winter- thour (Suisse). Il existe des représen- tations de SAM global à Ecublens/ FR (Suisse), en France et en Belgique.

Prochaine édition en mai :

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Soyez enracinés et fon- dés en lui (Jésus-Christ), affermis dans la foi telle qu’elle vous a été ensei- gnée, et soyez-en riches en exprimant votre reconnaissance à Dieu.

Colossiens 2.7

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