Le Dictionnaire Encyclopédique de la Psychanalyse

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Étonnamment, le terme Nachträglichkeit disparait (sauf quelques exceptions) de ses écrits à partir de 1917, alors que l'implication du processus à double sens devient plus fréquente. Freud crée ce concept alors que sa recherche était dominée par ses préoccupations étiologiques . Ces dernières devinrent isomorphes avec la tendance déjà observée par Breuer, à la remémoration selon un cheminement temporel à rebours . Breuer avait décrit une rétrogression (c'est-à-dire, le fait de reprendre l’histoire à partir d'un point précis du passé et de la répéter, dans l'objectif de la reconstruire et de s'en libérer), qui lui avait permis de concevoir la méthode cathartique (Freud et Breuer, 1895a). Freud poursuivit la voie de cette régression temporelle et lui a ajouté une obligation de s'exprimer par le biais de la verbalisation, donc par la production d’après-coup verbaux. Il s'est servi de cette tendance à la régression, associée à la contrainte de soutenir un lien verbal avec la conscience, au service du but thérapeutique. Ainsi, il promut une nouvelle méthode, la cure psycho-analytique définie par son protocole , sa règle fondamentale , laquelle requiert la libre association verbale, et un travail psychique spécifique, le travail de l’après-coup . Lors de son observation d’Emma, dans « Esquisse d’une psychologie scientifique », partie II, chapitre 4, « Le proton pseudos hystérique » (1895b, p. 352), Freud donne une description précise de l’après-coup ( Nachträglichkeit ) en se focalisant sur la régression temporelle dans les séances. Il décompose alors le temps 1, celui du coup , en deux scènes rétrogrades, desquelles l'une (scène I, au sujet des deux employées de magasin qui se moquent de sa robe quand Emma a 12 ans) est récente et re-mémorable, et l'autre (scène II, le souvenir refoulé d’avoir subi d'un épicier des attouchements sexuels à travers ses vêtements quand elle avait 8 ans) est plus ancienne et inconsciente dans le sens strict du terme. Il fonde sa pensée sur la théorie du traumatisme de Charcot qu'il avait déjà exposée dans l'ouvrage « Etudes sur l'hystérie » (Freud et Breuer, 1893-1895), avec la formation diachronique des symptômes en deux temps, et la méthode cathartique de rétrogression et d’élaboration associative de Breuer, mais il se différencie par sa recherche étiologique approfondie. Il met l'accent sur la direction à rebours de la remémoration cathartique quand elle a lieu dans les séances et le contenu sexuel de ce qui a été refoulé. Il intervertit ainsi le cours des évènements et du temps. Il nomme « scène I », la scène récente, « Le souvenir de la moquerie des commis lors de l’entrée d’Emma à 12 ans dans un magasin » ; et « scène II », celle-ci postérieure, « Le souvenir refoulé des attouchements subis par Emma dans un autre magasin quand elle avait huit ans ». Le second évènement, plus symptomatique encore, concerne l'agoraphobie qui a eu lieu lorsqu'elle est entrée seule dans un magasin. Les deux évènements sont séparés par un temps de latence. Le cas d'Emma, souffrant d'agoraphobie qui se manifeste par l'impossibilité d'aller seule dans un magasin (qualifié plus tard de « Modèle Nachträglichkeit d'Emma » par les théoriciens postfreudiens européens et nord-américains sur le sujet, et de paradigme par les théoriciens latino-américains) capture les premières définitions, par Freud, de Nachträglichkeit , mais aussi ses premières compréhensions au sujet du rôle du trauma, de la temporalité et de la mémoire en neurogénèse et dans le travail clinique, comme ce communiqué intemporel le résume :

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