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interpersonnel et intrapsychique de l'analyste et de l'analysant : le conflit entre le désir de reconnaissance et celui d'être distinct, unique, séparé. C'est en fait moins un conflit de désir que de transactions relationnelles, une collision entre des paradigmes du relationnel. Toute théorie du conflit doit impliquer une théorie de la motivation (Harris, 2005). L'un des théoriciens fondateurs de la perspective relationnelle, Greenberg (1991) a conservé le concept de pulsion pour parler de la fonction. Le travail de Mitchell (1997, 2000) a suivi une trajectoire semblable au modèle du conflit relationnel de Fairbairn, puis s'est intéressé à l'attachement et au développement selon Loewald. Selon Mitchell, nous ne sommes pas embarqués dans des matrices interactives, parce que nous y sommes déjà intégrés. Les relationnistes n'évitent certes pas la théorie de la pulsion ; au lieu de cela, ils la considèrent plutôt avec un p minuscule, dans le même esprit que Ghent (2002). Les idées de Ghent en ce qui concerne la motivation ont une dette vis-à-vis de celles d'Edelman (1987), selon lequel l'expérience humaine débute par des comportements primitifs plutôt simples et directs (comme se tourner vers la lumière et la chaleur, par exemple) qui progressivement s'imprègnent de ce que Edelman appelle des valeurs . Dans une cascade développementale qui se transforme rapidement en des expériences complexes, petites et subtiles (pas consciemment intentionnelles) qui émergent en des systèmes motivationnels élaborés ; la sexualité, l'agression et la sécurité sont des conséquences, non pas des moteurs de développement prédéfinis. Pour Edelman, le conflit est émergent, il n'est pas prédéfini au niveau conscient. Ghent et Harris considèrent le conflit au travers du prisme de la théorie des systèmes dynamiques non linéaires, ou la théorie du chaos, dans lequel le conflit est le très provocateur déclencheur du changement. La théorie du chaos contient une théorie de la transformation. Le déséquilibre provient du conflit. Le conflit est source de changement, de mouvement, de compréhension. Le conflit au service de la croissance ou de la transformation prend des formes différentes. Le conflit, même au niveau inconscient, entre des manières d'être ou d'être en relation, peut provoquer une déstabilisation de schémas et de négociation d'expérience. Mais il existe un point dans le travail analytique où les contradictions conflictuelles, soit de représentations mentales ou de relations d'objet, sont retenues indéfectiblement à l'esprit : un point où le conflit peut planer juste à la limite du chaos. Cela est probablement le cas plus particulièrement dans le travail réalisé auprès de patients dans un processus de deuil et de perte d'objet. III G. La perspective lacanienne française Pour explorer le rôle du conflit selon Lacan, un terme qui ne porte pas de reconnaissance particulière dans ses écrits et ses enseignements, David Lichtenstein (Christian, Eagle & Wolitzky, 2017; pp.177-194) a exploré l'idée de la division subjective et la structure de cette division, comme Lacan le perçoit. Ce faisant, il illustre aussi bien ce qui, dans le travail de Lacan, dérive de l'idée classique du conflit intrapsychique que ce qui s'en détache. Un concept fondamental de la théorie de Lacan sur le sujet divisé est celui du manque. Le mot en français, manque , illustre autant la ‘perte’ que le ‘manque’ mais aussi la ‘vacuité’ et le ‘vide’. Lacan considère que la rencontre psychique avec la perte est essentielle à la formation du sujet humain. En effet, le sujet en tant que tel vient à la vie en affrontant et en se représentant
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