FNH N° 1014 HD

T RIBUNE LIBRE

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VENDREDI 12 MARS 2021 FINANCES NEWS HEBDO

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Menaces sur la réforme éducative par une gouvernance centralisée : cas de la planification et de l’orientation S ur une vingtaine d’années, la réforme éducative et son suivi ont renvoyé des mes- sages persistants et para- doxaux : à chaque étape et notamment, par les soins du Conseil supérieur de l’enseignement (CSE, 2008, 2009), qui a évalué les résultats de la décennie de la réforme éduca- tive (2000-2010). Par Azeddine Akesbi, professeur au COPE

n’a pas été rendue publique. A signa- ler que le CSEFRS, qui est censé jouer un rôle d’orientation et de conseil stra- tégiques, ne prend plus de décisions du fait du non renouvellement de ses membres après la fin du dernier man- dat. Avec la Vision stratégique 2030 et la loi-cadre, le système éducatif risque de se trouver une fois de plus dans la répétition du même scénario (ce que nous n’espérons pas). Avec, en outre, une aggravation liée au contexte de la pandémie et un secteur malmené par l’enseignement et la formation à distance (décrochages, problèmes d’iniquités, qualité et suivi…). Au-delà de tous les facteurs étu- diés pour expliquer les échecs ou les résultats modestes atteints, une question se pose de manière récurrente; elle mérite toute notre attention : Comment expliquer que malgré les efforts dans la concep- tion des politiques éducatives et les moyens plus ou moins importants mobilisés, les objectifs de la réforme sont restés hors de portée ? Quelle responsabilité de la gou- vernance centrale dans l’échec de la réforme éducative ? Une piste pouvant permettre la com- préhension de cette situation com- mence à s’imposer de plus en plus. Elle pourrait expliquer l’écart constant qui existe entre la conception de la politique conçue et les résultats déce- vants de sa mise en œuvre. Et de nous dire pourquoi la politique éducative ne parvient pas à être mise en place sur le terrain de manière satisfaisante ? Comme évoqué précédemment, plu- sieurs facteurs/causes sont connus

Le «nouveau souffle !» et le dépas- sement devaient être apportés par le Programme d’urgence (2009-2012); programme doté de moyens financiers et un encadrement plus consistants (sous la forme de projets avec des équipes de suivi). En 2014, des éva- luations indépendantes et le rapport analytique du Conseil supérieur de l’enseignement (CSEFR, 2014) 1 sont parvenus à des constats et conclu- sions unanimes de non réalisation des objectifs du programme d’urgence. En plus des problèmes devenus habi- tuels, comme les fortes déperditions scolaires et universitaires et les faibles niveaux des acquis, va s’ajouter la gouvernance problématique. Dans le même sens, la Cour supérieure des comptes (CSC) a produit un rapport accablant sur la mise en œuvre du programme d’urgence. En résumé, la CSC souligne que les résultats du programme d’urgence sont largement en deçà des objectifs ciblés : «…Il n’a pas eu, non plus, les impacts souhaités sur le système édu- catif.» (CSC, 2018) 2 . Ce rapport a éga- lement listé une série impressionnante de dysfonctionnements observés dans la gestion et la mise en œuvre du pro- gramme d’urgence. L’apparition avec force du caractère problématique de la gouvernance éducative a été cer- tainement à l’origine de l’étude effec- tuée par le CSEFRS sur cette théma- tique (elle est encore dans les tiroirs). Cependant, malgré sa validation par les instances du Conseil, cette étude

départ importants de la réforme édu- cative, les pouvoirs publics lancent une initiative et fixent des objectifs ambitieux. Ensuite, après une période de mise en œuvre de cette politique, les résultats atteints s’avèrent au mini- mum décevants. Après, on relance une nouvelle conception de la poli- tique éducative pour ensuite faire un constat similaire globalement d’échec. Ce scénario est devenu classique, récurent au moins depuis les années 2000. Les contreperformances de la réforme éducative relèvent aussi bien de la dimension qualitative que quantita- tive. Le bilan a été fait à maintes occasions. Le public averti ou non est au courant des déperditions scolaires persistantes, de la faible qualité des apprentissages dans pratiquement toutes les matières et niveaux. Ils ont été constatés de manière répétitive par les tests nationaux et internatio- naux. De même, l’espérance de vie scolaire demeure anormalement faible même par rapport à des standards de pays comparables. Au final, la popula- tion et le pays souffrent d’un déficit du développement du capital humain…. Depuis l’année 2000 et l’adoption de la Charte nationale de l’éducation et la formation (CNEF), le Maroc a pris connaissance d’un bilan globalement négatif de sa réforme éducative. Ce bilan documenté a été livré en 2009,

Avec la Vision straté- gique 2030 et la loi-cadre, le système édu- catif risque de se trouver une fois de plus dans la

répétition du même scénario.

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