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JEUDI 31 MARS 2022
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Le Maroc au Sommet du Néguev La diplomatie de la paix L e Maroc était présent au Sommet de Néguev en Israël, en la personne du ministre des Affaires étrangères. Rabat a tenu à partager avec les cinq pays présents - Etats Unis, Israël, Emirats Par Mustapha SEHIMI Professeur de droit, Politologue
arabes unis, Bahreïn et Egypte - des préoccupa- tions convergentes, sinon communes. L'ordre du jour plaçait au premier plan une forme d’"alliance" contre l'Iran. C'était d'autant plus contraignant qu'il apparaît bien que la conclusion d'un nouvel accord sur le nucléaire iranien serait imminente. Josep Borrel, chef de la diplomatie européenne, a déclaré samedi dernier, en marge du Forum de Doha (Qatar), que cet accord en négociation avec les grandes puissances est une «affaire de jours». Une affirmation liée au fait que le même jour, le coordonnateur de l'UE en charge de la supervision des pourparlers, Enrique Mora, arrivait à Téhéran. Un agenda non confirmé pourtant par le porte- parole de la diplomatie américaine, Ned Price, qui a déclaré qu'un accord n'était «ni imminent ni certain»... Un fait est certain : le retour en force de Téhéran sur la scène internationale aura des conséquences politiques, financières et militaires non seulement pour ce pays, mais aussi ses relais dans la région (Liban, Irak, Yemen, ...). Le Maroc a, pour sa part, des rapports heurtés avec le régime chiite. Voici quatre ans, le 1er mai 2018, Rabat avait ainsi rompu ses relations diplomatiques en invoquant le soutien militaire de l'organisation chiite libanaise du Hezbollah - financée par le régime iranien - aux milices du mouvement séparatiste du "Polisario". Les relations avaient été rétablies en février 2014 après une précédente rupture en mars 2009 à cause de l'ingérence de Téhéran dans les affaires intérieures du Bahreïn et du prosélytisme chiite dans le Maroc. Soutien à la cause palestinienne Comme les autres officiels participant au sommet, Nasser Bourita a condamné l'attentat terroriste commis la veille à Hedera qui a causé la mort de deux policiers par deux Arabes-Israéliens, pré- sentés comme proches de l'organisation Daech. Il a déclaré que ce rendez-vous est «la meilleure réponse à de telles attaques»; que la présence du Maroc est une confirmation des relations profondes liant les deux pays et la communauté marocaine à la communauté juive en Israël"; et
que Rabat exprime de nouveau son appui à la solution de deux Etats au conflit israélo-palesti- nien, sur la base des frontières de 1967 et avec un Etat palestinien ayant pour capitale Al Qods-Est. Il a enfin conclu en formulant un vœu : celui des six participants au sommet de Néguev se réunissant "dans un désert différent, mais avec le même esprit" : le Sahara marocain... Le Sommet du Néguev, tenu les 27-28 mars, est un succès pour Israël. Il a été organisé à grande vitesse à l'initiative du ministre des Affaires étran- gères, Yaïr Lapid, à Sde Boker - là où vivait David Ben Gourion, fondateur de l'Etat d'Israël et pre- mier Premier de l'Etat hébreu; c'est également là, dans ce lieu historique, que se trouve sa sépulture et celle de son épouse. Du symbole donc. A forte dose. Pour faire sens, autrement dit, pour confor- ter et illustrer la nouvelle légitimité d'Israël. Cet Etat a ainsi fortement renforcé son importance régionale pour ses partenaires qui ont signé les "Accords d'Abraham", le Maroc, Bahreïn et les Emirats arabes unis. Il faut y ajouter l'Egypte avec laquelle un Traité de paix a été signé en 1979. Par leur seule présence, les ministres des Affaires étrangères de ces quatre pays alliés donnent un contenu et une dimension nouvelle aux rela- tions avec Israël. Cette rencontre du Néguev est intervenue juste une semaine après que le pré- sident égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, a accueilli le Premier ministre israélien, Naftali Bennett, et le prince héritier émirati, Mohammed bin Zayed al-Nalhyan. Ce sommet a été chaleureux. Très médiatisé aussi.
Il faut noter, par ailleurs, que le sommet du Néguev a coïncidé avec une visite, programmée à Ramallah, par le Roi Abdallah de Jordanie. A son ordre du jour, les moyens d'apaiser les ten- sions entre Israéliens et Palestiniens à la veille du Ramadan, à la fin de cette semaine. Mais il est évident que l'évolution majeure que connaît la région a été tout aussi importante. Avant de partir pour le sommet du Néguev, Anthony Blinken, secrétaire d'Etat américain, a rencontré dimanche les leaders israéliens et le président de l'Autorité Palestinienne, Mahmoud Abbas. Ce responsable américain n'a pu obtenir de Nafftali Bennett l'invi- tation de la Jordanie ni celle de la direction pales- tinienne. Mais il y a plus pour Israël qui engrange une valeur ajoutée, non seulement pour le lieu choisi, mais aussi pour l'ordre du jour retenu. Référence est faite aux efforts déployés visant à réunir et à mettre sur pied une alliance efficace contre l'Iran - il est considéré comme une menace pour tous les acteurs présents, à un titre ou à un autre. L'Arabie saoudite n'était pas présente, pas plus qu'elle ne s'est ralliée aux Accords d'Abra- ham. Officiellement, Tel Aviv et Ryad ne sont pas des alliés. Mais toutes deux œuvrent activement à renforcer l'unité régionale contre Téhéran (partage de renseignements, alertes régionales au missile, systèmes de défense, ...). Ukraine/ Moyen -Orient : «Deux poids, deux mesures»... Pour le Maroc, cette nouvelle alliance ne peut déclasser, voire évacuer d'autres grands dossiers
Le retour en force de Téhéran sur la scène internatio- nale aura des conséquences politiques, financières et militaires non seule- ment pour ce pays, mais aussi ses relais dans la région.
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