Carillon_2018_03_22

TREIZE ANS DANS LES CONTENEURS

médiatique. Mais à en croire M. St-Jean et samère, ce sont les difficultés de la vie qui les ont catapultés dans les profondeurs abyssales des conteneurs qu’ils ne veulent plus quitter. Leur histoire avait commencé à Montréal, qu’ils ont dû quitter « pour problèmes de voisinage ». Ils se sont installés à Lachute, d’où ils ont déménagé après s’être plaints des voisins et de l’état insalubre de l’appar- tement qu’ils occupaient. Direction cette fois, Pine-Hill, mais un jour le propriétaire de l’appartement qu’ils avaient loué les aurait renvoyés. « À Pine-Hill, il y avait plein demoisissures, s’est rappelé M. St-Jean, avec l’approbation de sa mère. On payait 325 $ par mois. Le propriétaire a vendu la maison et a dit qu’on n’avait pas payé le loyer. On a campé 12 jours dehors. Alors qu’il expliquait cette situation, samère laissait tristement ruis- seler sur son visage pâle de grosses larmes, qui s’échappaient de ses yeux battus. Dans la rue, il fallait bien qu’ils fassent quelque chose. C’est alors que l’idée leur était venue d’aller s’installer sur le domaine que la mère, Suzanne Gauthier, avait acheté à Brownsburg-Chatham en 1989. Elle travaillait à l’époque dans un centre communautaire à Montréal. Les deux ont donc décidé d’occuper leur propriété en y installant progressivement quatre conteneurs. Deux conteneurs tenaient lieu de chambres à coucher, un de garde-manger et le dernier d’entrepôt. « Je me sens plus en sécurité dans un conteneur que dans une maison. C’est solide. Dans les maisons en bois, s’il y a un incendie, tout est brûlé avant que les pompiers arrivent et on n’a plus rien. Un conteneur ne peut pas brûler, à moins qu’il y ait un incendie à l’intérieur. Dans les maisons, il y a des fourmis, des rats, des moisissures. Même si onm’offrait un loge- ment ou une maison gratis à vie, je n’en voudrais pas », amaintenu Mme Gauthier. Elle s’empresse d’ajouter : « Dans les conteneurs, je n’ai pas de voisins, je ne PLUS DE SÉCURITÉ DANS LES CONTENEURS QUE DANS LESMAISONS ?

PORTRAIT

FRÉDÉRIC HOUNTONDJI frederic.hountondji@eap.on.ca

Un conteneur et une voiture, installés dans les bois àBrownsburg- Chatham, servent demaison depuis plus de 10 ans pour Stéphane St- Jean, 51 ans, et sa mère Suzanne Gauthier, 79 ans. Toutes les mesures prises par la Ville pour les en déloger sont pour l’instant sans résultat. M. St-Jean et Mme Gauthier dénoncent, néanmoins, ce qu’ils quali- fient d’acharnement de la municipalité. Ils accusent la justice et en veulent aux voisins qui, selon eux, seraient allés se plaindre de leur mode de vie auprès des autorités municipales. « Pour eux, nous vivons dans des conte- neurs, on est des pauvres, des abrutis, des niaiseux et on ne connaît rien. Ils doivent

savoir qu’on n’est pas des déficients, se défendM. St-Jean. On n’est pas des caves. On n’est pas des imbéciles. La Ville nous prend pour des imbéciles. » Les deux s’estiment bien heureux de la vie qu’ils mènent et font miroiter les avan- tages de leur habitation d’un genre bien particulier. Ils se disent y être en bonne santé et en sécurité. « On nous reproche d’avoir un conte- neur parce que pour eux le conteneur est comme du poison. C’est comme une maladie. Le conteneur, c’est la nouvelle technologie qui est en train de se faire, et c’est déjà fait, c’est la tendance zen. Mais ils ne veulent pas l’accepter, parce que les gens n’ont pas évolué. Ils sont bornés. Et ce n’est plus une histoire de conteneur,

Stéphane St-Jean dans le conteneur avec sa mère Suzanne Gauthier. —photo Frédéric Hountondji

c’est une question personnelle. Ils veulent carrément se débarrasser de nous », a pesté le quinquagénaire. Tout son corps semblait secoué par un sentiment de révolte, le sentiment d’être incompris et complètement rejeté par ses voisins. Pas évolués, bornés, tendance, nouvelle technologie…ces mots qu’il lançait à qui voulait bien l’entendre pourraient donner à penser, à tort ou à raison, qu’on a affaire à unmoralisateur zélé enmal de popularité NAUFRAGÉS DE LA MISÈREHUMAINE

Publié le jeudi par : La Compagnie d’édition André Paquette Inc. Imprimé par : Imprimerie Prescott et Russell, Hawkesbury, ON # convention : 0040012398

BERTRAND CASTONGUAY Président bertrand@eap.on.ca

5 La mère et son fils devant leur conteneur. —photo Frédéric Hountondji

1100, rue Aberdeen, Hawkesbury, ON K6A 1K7 Tel.: 613-632-4155 • 1-800-267-0850 Fax.: 613-632-6383

YVAN JOLY Directeur des ventes yvan@eap.on.ca

FRANÇOIS LEGAULT Directeur de l’information francois.legault@eap.on.ca

Nous invitons les lecteurs à nous faire parvenir leurs lettres qui ne doivent pas dépasser 300mots. Nous nous réservons le droit de les modifier ou de refuser de les publier. L’expéditeur doit inclure son nom, prénom, adresse et numéro de téléphone.

GILLES NORMAND Directeur de Production et Distribution gilles.normand@eap.on.ca THOMAS STEVENS Directeur de l’infographie et prépresse thomas.stevens@eap.on.ca

Publicité : yvan@eap.on.ca

Avis : En cas d’erreur ou d’omission, la responsabilité du journal ne dépasse, en aucun temps, le montant de l’espace de l’erreur en cause.

Toute reproduction du contenu est interdite à moins d’autorisation écrite au préalable.

Nouvelles : nouvelles@eap.on.ca

www.editionap.ca

Le Carillon, Hawkesbury ON.

8

Le jeudi 22 mars 2018

Made with FlippingBook flipbook maker