Finances News Hebdo N° 1074

Découvrez le numéro 1074 de Finances News Hebdo, premier hebdomadaire de l'information financière au Maroc

Du 29 juillet 2022 - 8 DH - N° 1074

PREMIER HEBDOMADAIRE DE L'INFORMATION FINANCIÈRE AU MAROC

Directeur de la publication : Fatima Ouriaghli

P. 20 à 41 Ces chantiers royaux structurants Fête du Trône

ASSURANCE MALADIE OBLIGATOIRE

«Nous sommes dans les délais»

● Préparation de la généralisation de l'AMO, placements de la CNSS, réforme du système de retraite.., Hassan Boubrik, DG de la CNSS, se confie à Finances News Hebdo sans langue de bois.

P. 42 à 48

«Le régime des sanctions doit être renforcé…» Protection des données à caractère personnel P. 52

Omar Seghrouchni, président de la CNDP

Dépôt légal : 157/98 ISSN : 1114-047 - Dossier de presse : 24/98 - Adresse : 83, Bd El Massira El Khadra, Casablanca - Tél. : (0522) 98.41.64/66 - Fax : (0522) 98.40.22 - Adresse web : www.fnh.ma

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S OMMAIRE

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> Actualité

Tourisme : La disette, c’est fini ! Ça se passe au Maroc Ça se passe en Afrique Ça se passe dans le monde

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> Bourse & Finances

Point Bourse Hebdo : Un parfum de vacances flotte à la Bourse de Casablanca Marché secondaire des créances en souffrance : Où en est le projet mené par BAM ? IT/ Matériel informatique : Des tendances de fond qui drivent la croissance du secteur L’Euro, une monnaie mort-née L’Italie de nouveau dans la tourmente

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Editorial

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Par Fatima Ouriaghli

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V ive les vacances ! L’équipe de Finances News Hebdo prend congé. Votre hebdomadaire sera absent des kiosques pendant quelques semaines et reviendra à la fin du mois. En restant toujours fidèle à sa devise : ne pas juste donner l’info, mais l’info juste. Comme nous l’avons fait tout au long de ces derniers mois où, depuis plus de deux ans, c’est la pandémie liée à la Covid-19 qui est toujours au cœur de l’actualité. Convenons cependant que même si le coronavirus circule toujours, il pose beaucoup moins de contraintes sur le plan sanitaire. Ce qui légitime le retour de l’opération Marhaba, qui va permettre à des centaines de milliers de Marocains de retrouver leur terre natale. Cela justifie également l’engouement des citoyens à vouloir voyager à l’étranger en cette période esti- vale. Sauf qu’entre les restrictions sur les visas imposées par la France et les difficultés à avoir des rendez-vous pour décrocher ce fameux visa Schengen, beaucoup ont dû déchanter. Et c’est peut-être le moment de faire preuve de patriotisme économique, en soutenant notamment le secteur touristique national, qui se remet petit à petit d’une crise qui l’a fortement affaibli. Encore faut-il que l’offre réponde aux attentes et besoins des Marocains sur le plan qualitatif, mais davantage au niveau des prix. Car, si actuellement les Marocains snobent quasiment le Covid-19, ils sont cependant davantage préoccupés par la cherté de la vie. Depuis plusieurs mois, ils voient leur pouvoir d’achat fondre comme neige au soleil, devant une indifférence quasi outran- cière du gouvernement. Lequel, face à une hausse généralisée des prix, se refuse à prendre des mesures choc comme le font plusieurs Etats à travers le monde, où le pouvoir d’achat est au centre du débat national. Beaucoup de citoyens passeront donc des vacances au rabais, calculette en main, en appréhendant aussi la prochaine rentrée scolaire et les frais qui vont avec. Conséquences : la grogne sociale devient de plus en plus audible. Et le #dégage_akhannouch en est le symbole le plus frappant. Le chef de gouvernement prêtera-t-il une oreille atten- tive à ce mécontentement populaire à l’heure où se prépare le projet de Loi de Finances 2023 ? Se décidera-t-il à s’ouvrir et à communiquer avec les citoyens ? Il faut l’espérer. Et les attentes à ce niveau sont nombreuses. En tout cas, nous suivons de près ce dossier du pouvoir d’achat et les éventuelles mesures qui pourraient être prises. Car, même si nous suspendons la parution de notre hebdomadaire, vous pouvez toujours nous suivre sur nos sites (fnh.ma, laquotidienne. ma, boursenews.ma et iktissadkom.ma). L’info ne prend pas de congés ! Bonnes vacances ! VACANCES AU RABAIS

MOHAMMED VI : Un Roi visionnaire Nouveau modèle de développement : Un chantier royal très ambitieux Protection sociale : Le Maroc entame sa révolution sociétale Protection sociale : Un levier pour réduire la taille de l’informel Entretien avec Abdelmajid Belaïche : Protection sociale, «Notre pays pourra enfin avoir un système de santé solide et juste» Charte de l’investissement : Dernière ligne droite Fonds Mohammed VI pour l'investissement : Une carte d’espoir pour une relance durable Réforme des EEP : Nouvelle dynamique pour un secteur névralgique Généralisation du préscolaire : Un chantier multidisciplinaire Entretien avec Aziz Kaichouh : Préscolaire, «La FMPS gère 60% de l’offre préscolaire publique»

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> Invité de la rédaction

Assurance maladie obligatoire : «Nous sommes dans les délais sur le plan opérationnel» Réforme du régime de la CNSS : La sonnette d’alarme est tirée Gestion des réserves de la CNSS par la CDG : Un retour à la normalité plus que souhaité

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> Economie

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Secteur industriel : Les ingrédients pour réussir de nouveaux écosystèmes Entretien avec Omar Seghrouchni : Protection des données à caractère personnel, «Le régime des sanctions doit être renforcé…» Tourisme : La destination Casablanca-Settat se cherche un nouveau positionnement Stress hydrique : Ne plus regarder ailleurs… Stress hydrique : Le Maroc dans une situation catastrophique Textile et habillement : L’AMITH veut consolider la production locale

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Hausse du prix de l’huile de table : Ce qu’il faut savoir Entretien avec Btissam Belaiche : Marketing digital pharmaceutique, «Aujourd’hui, aucune entreprise ne peut se passer de la digitalisation ou l’ignorer»

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> Focus Agricole 62 Figues de barbarie : La filière fortement impactée par la cochenille du cactuscactus

> L'univers des TPME 63

Agriyoung Innovate : Le roadshow se poursuit

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> High-Tech 64

Cryptomonnaies : Round-up du marché des plate- formes d’échange

• Directeur Général responsable de la Publication : Fatima OURIAGHLI Contact : redactionfnh@gmail.com

• Directeur des rédactions & Développement : David William • Journalistes : Charaf Jaidani, Leïla Ouriaghli, Adil Hlimi, Momar Diao, Youssef Seddik, Khalid Aourmi, Réda Kassiri Houdaifa, Ibtissam Zerrouk, Malak Boukhari, Meryem Ouaanna, • Révision : M. Labdaouat • Directeur technique & maquettiste : Abdelillah Chamseddine • Mise en page : Zakaria Beladal • Assistantes de direction : Amina Khchai • Département commercial : Samira Lakbiri, Salma Benmakhlouf, Rania Benchaib • Administratif : Fatiha Aït Allah, Nahla Sahlal • Édition : JMA CONSEIL • Impression : Maroc Soir • Distribution : Sochpress • Tirage entre 15.000 et 18.000 exemplaires • Dépôt légal : 157/98 • ISSN : 1114-047 • Dossier de presse : 24/98 • N° Commission paritaire : H.F/02-05

V OYONS VOIR

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Tourisme La disette, c’est fini ! Par D. William

L es opérateurs du tourisme ont la banane. Ils ne traversent plus cette période de désert touris- tique qui a fortement sinistré le secteur et plongé les profession- nels dans le désarroi. Fini la période de disette. Les touristes reviennent de plus belle. Les touristes dépensent. C’est ce que révèlent les tout derniers chiffres divulgués mardi au Parlement par la ministre de tutelle, Fatim-Zahra Ammor. Elle fait savoir que 3,4 millions de tou- ristes étrangers ont visité le Maroc au cours des six premiers mois de l'année en cours, un nombre qui a quadruplé par rapport à la même période en 2021 et qui représente 63% du nombre d'arrivées enregistré en 2019. Rien qu’en juin dernier, le nombre de touristes a atteint 1,14 million, soit une hausse de 5% par rapport à 2019. De leur côté, les recettes en devises s’inscrivent dans cette même tendance haussière. Elles se sont établies à 20 Mds

de DH au cours des cinq premiers mois de l’année, soit une augmentation de 173% par rapport à 2021, et un taux de récupération de 71% par rapport à 2019. C’est bien. Mais il faut consolider cette reprise. Cela ne passe pas uniquement par la multiplication des opérations séduction à l’égard des tours opérateurs et compagnies aériennes étrangères. Il faut aussi un ancrage local fort, à savoir courtiser les Marocains afin de faire du tourisme interne un véritable levier de développement du secteur. Pendant longtemps, le tourisme national n’a servi que de bouche-trou pour pal- lier les déficits des arrivées de touristes étrangers, surtout en période de crise. Et tous les plans et programmes initiés dans ce sens n’ont accouché que de résultats médiocres. La raison est simple : l’inadé- quation de l’offre, en termes de rapport qualité/prix, avec les attentes et besoins des touristes nationaux. Et il va falloir définitivement régler cette

problématique afin que le tourisme interne joue pleinement son rôle en tant que locomotive de développement de tout un écosystème, mais qu’il assure surtout la résilience du secteur lors des périodes de crise. Lesquelles deviennent de plus en plus fréquentes. Dès lors, il faut des mesures fortes. Structurantes. Et non des initiatives ponctuelles et cos- métiques. Fatim-Zahra Ammor a promis de se pen- cher sur ce problème afin de mettre en place des bases solides d'un dévelop- pement durable du tourisme interne. Les axes de son action : l'encouragement de l'investissement dans le tourisme interne et les loisirs, la création de stations proposant des prix à la portée de tous les touristes marocains et la coordina- tion avec le ministère de l'Économie et des Finances pour créer des chèques de voyage à même d'alléger la charge des dépenses pour le touriste national. Suffisant ? On verra bien. ◆

Les recettes en devises

ont atteint 20 Mds de DH au cours des cinq premiers mois de l’année, en hausse de 173% par rapport à 2021.

oui , je souhaite m’abonner à cette offre spéciale pour 1 an BULLETIN D’ABONNEMENT Mon abonnement comprend : ❑ 48 numéros Finances News hebdo & 2 numéros du Hors-série. Voici mes coordonnées : ❑ M ❑ Mme ❑ Mlle Nom/Prénom : ................................................................................... Adresse : ............................................................................................ Ville : ............................. Code Postal : ............................................ Tél : ........................................ Fax : ................................................. E-mail : ............................................................................................. Mon règlement ci-joint par : ❑ Chèque bancaire ou virement bancaire à l’ordre de JMA Conseil : Banque Populaire, Agence Abdelmoumen, Compte N° 21211 580 5678 0006-Casablanca - (Maroc)

Ç A SE PASSE AU MAROC

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A l’occasion de la Fête du Trône La Direction de JMA Conseil et l’ensemble du personnel de Finances News Hebdo, d’Autonews, de La Quotidienne et de Boursenews présentent leurs voeux déférents à SA MAJESTÉ LE ROI MOHAMMED VI Que Dieu Le glorifie Son Altesse Royale le Prince Héritier Moulay Al Hassan, Son Altesse Royale la Princesse Lalla Khadija, Son Altesse Royale le Prince Moulay Rachid, à l’ensemble de la glorieuse Famille Royale, ainsi qu’au peuple marocain.

Le gouvernement table sur une croissance de 1,5% en 2022 et 4,5% en 2023 L a croissance économique nationale devrait atteindre 4,5% en 2023, au lieu de 1,5% prévu cette année et ce, en dépit d'une conjoncture internationale perturbée. Selon la ministre de l'Economie et des Finances, Nadia Fettah, qui pré- sentait mercredi devant la Commission des finances et du déve- loppement économique à la Chambre des représentants un exposé sur «L'exécution du Budget 2022 et la programmation budgétaire triennale 2023-2025», ces prévisions sont basées sur les hypothèses d'une récolte céréalière de 75 millions de quintaux (Mqx) en 2023, d'un repli du prix du gaz butane à 700 dollars/tonne et d'une baisse du cours du pétrole à 93 dollars/ baril et, par conséquent, le retour du taux d'inflation à 2%. Parallèlement, elle a noté que ces prévisions sont susceptibles d'être revues à la baisse en cas de poursuite de la détérioration des perspectives de reprise de l'économie mondiale en 2023, en particulier dans l'Union européenne en raison des réper- cussions de la guerre en Ukraine et ses effets sur les prix des matières premières et les chaînes mondiales de production et d'approvisionnement, en plus du durcissement des politiques monétaires pour maîtriser les tensions inflationnistes. Le ministère cible ainsi l'atténuation du déficit budgétaire en 2023 à 4,5% et à 3,5% en 2025, a-t-elle fait savoir, estimant que l'atteinte de ces objectifs passe par une série de réformes et mesures nécessitant la mobilisation de ressources supplémen- taires. ■

Le projet de la cité Mohammed VI Tanger Tech sur les rails

U ne convention cadre pour la réalisa- tion du projet de la cité Mohammed VI Tanger Tech a été signée lors d’une cérémonie qui s’est tenue le lundi 25 juillet à Rabat. Les signataires de cette conven- tion sont le ministère de l’Industrie et du Commerce, le ministère de l’Economie et des Finances, le ministère de l'Equipement et de l'Eau, la Wilaya de la région Tanger- Tétouan-Al Hoceima, le Conseil de la région Tanger-Tétouan-Al Hoceima, la SATT, Bank of Africa, l'Agence spéciale Tanger Méditerranée (TMSA) et les sociétés Beijing Zhonglu Urban Development Corporation, China Communications Construction Company LTD, China Road and Bridge Corporation LTD et CCCC Investment Company LTD. Le projet de la cité Mohammed VI Tanger Tech porte sur la réalisation d’une ville industrielle durable, intégrée et intelligente, ayant comme objectif d’insuffler une nouvelle dynamique dans les activités économiques du Royaume et de consolider son ancrage dans l’espace euro-méditerranéen.

Situé dans les communes de Laaouma et de Sebt Azzinate dans la région Tanger-Tétouan- Al Hoceima, ce projet, qui s’étend sur une superficie globale de 2.167 ha, comprendra une zone d’accélération industrielle (ZAI) d’une superficie globale de 947 ha, dont 467 ha ont déjà été érigés en ZAI conformément aux dis- positions de la loi 19-94 relative aux ZAI. Le projet englobe également une smart city avec une superficie globale de 1.220 hectares, qui comprendra des zones de services, des ensembles résidentiels, touristiques et de loi- sirs, ainsi que l’ensemble des infrastructures publiques nécessaires au bon fonctionnement de la ville. ■

Maroc-Banque mondiale

500 millions de dollars pour renforcer le capital humain

L e Maroc et la Banque mondiale (BM) ont signé, lundi à Rabat, un accord de financement de 500 millions de dol- lars, représentant la première tranche du prêt consacré au renforcement du capital humain pour un Maroc résilient. Signé par le ministre chargé du Budget, Fouzi Lekjaa, et le directeur du département Maghreb et Malte à la Banque mondiale, Jesko Hentschel, ce financement vise à améliorer la protection contre les risques sanitaires, les pertes de capital humain dans l'enfance et la pauvreté pendant la vieillesse, ainsi qu'à améliorer la gestion des

risques climatiques et la résilience face aux événements catastrophiques. ■

8.105.073 C’est le nombre d’opérations durant le 1er semestre 2022, pour 3.849.822.197 DH, effectuées en devises par les cartes bancaires maro- caines à validité internationale, auprès des commerçants, des sites mar- chands et des GAB à l’étranger. La progression est de +38,5% en nombre et +75,2% en montant par rapport à la même période de 2021.

Le chiffre de la semaine vous est proposé par

Ç A SE PASSE EN AFRIQUE

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Le FMI débloque un nouveau prêt pour le Cameroun

L e Fonds monétaire interna- tional (FMI) a annoncé un nouveau décaissement à hauteur de 72,9 millions de dol- lars américains en faveur du Cameroun, après la deuxième revue de l'institution financière des accords triennaux avec le pays d'Afrique centrale au titre de la facilité élargie de crédit et du mécanisme élargi de crédit d'un

montant total de 346,1 millions de dollars. Le FMI a estimé que les résul- tats du Cameroun, au titre des accords triennaux signés en fin juillet 2021, «restent conformes aux objectifs et les réformes struc-

turelles progressent, même si des retards sont observés dans cer- tains domaines essentiels» , selon une note d'information. Pour l'an- née en cours, le FMI a prévu ainsi une croissance de 3,8% du PIB réel du Cameroun. ■

La croissance de l'Afrique du Sud insuffi- sante pour faire face aux défis socioéconomiques

L ’ économie sud-africaine ne croit pas à un rythme suffisant à même de faire face aux défis socioéconomiques auxquels le pays est confronté, selon le président sud-africain Cyril Ramaphosa. «Nous avons été confrontés à des taux élevés de chômage, à des inégalités croissantes et à des niveaux élevés de pauvreté au cours des deux dernières décen- nies» , a déclaré Ramaphosa dans sa newsletter hebdoma- daire, notant que le ralentisse- ment économique ne permet pas de réduire de manière signifi- cative ces problèmes sociaux. Il a ajouté que pour répondre à ce «triple défi», l’Afrique du Sud a besoin d'une série d'interven- tions ciblées, notamment pour attirer davantage d'investisse- ments et renforcer les capacités de l'État en matière de presta- tions de services. ■

Ç A SE PASSE DANS LE MONDE

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Shell, TotalEnergies : La flambée des cours propulse les bénéfices des pétroliers

B énéfice trimestriel plus que doublé pour le fran- çais TotalEnergies et même quintuplé pour le britannique Shell : les prix des hydrocarbures, qui flambent depuis l'invasion russe de l'Ukraine, propulsent les bénéfices des géants pétroliers. Shell a ainsi publié un bénéfice net part du groupe de 18 milliards de dollars pour le deuxième trimestre, qui pro- fite aussi d'une reprise de provisions de 4,3 milliards de dollars, après que la major pétrolière a revu à la hausse ses projections de prix du pétrole et du gaz, revenant sur une partie des dépréciations massives de la pandémie de Covid-19. TotalEnergies, de son côté, a plus que doublé son béné- fice net part du groupe au deuxième trimestre à 5,7 mil-

liards de dollars, en dépit d'une nouvelle provision de 3,5 milliards de dollars liée à l'impact potentiel des sanctions internationales sur la valeur de sa participation dans l'entreprise russe Novatek. ■ Croissance mondiale : Le FMI abaisse ses prévisions et évoque une conjoncture «sombre et incertaine»

L e Fonds monétaire international (FMI) a abaissé ses pré- visions de croissance pour l’économie mon- diale cette année et l’an

Espagne : Le gouvernement maintient sa prévision

prochain, évoquant une conjoncture «sombre et incer- taine», compte tenu de plusieurs «chocs» qui accentuent les effets de la pandémie. «Plusieurs chocs ont frappé une économie mondiale déjà fragilisée par la pandémie : une inflation plus élevée que prévu dans le monde, déclenchant des conditions finan- cières plus strictes, un ralentissement pire que prévu en Chine, reflétant les flambées du COVID-19 et les restric- tions, et d'autres retombées négatives de la guerre en Ukraine» , a indiqué le FMI. Les économistes de l’institution anticipent ainsi un ralentissement de la croissance de 6,1% l'an dernier à 3,2% en 2022 et 2,9% en 2023, soit respectivement 0,4% et 0,7% de moins que dans leurs prévisions du printemps. ■ Semi-conducteurs Biden appelle le Congrès à débloquer 52 milliards de dollars le Congrès à adop- ter «au plus vite» une loi qui prévoit 52 mil- liards de dollars pour soutenir la production de semi-conducteurs aux Etats- Unis. «L'Amérique a inventé les semi-conducteurs mais, au fil du temps, nous avons laissé la production partir à l'étran- ger» , a déploré le président américain. Pour lui, il est «impératif», pour des raisons économiques mais aussi de sécurité nationale, que les Etats-Unis fabriquent de nouveau ces puces électroniques pré- sentes dans de nombreux objets de la vie quotidienne. ■ L e président américain Joe Biden a exhorté

F ace à l'inflation qui ne ralentit pas aux États-Unis, la FED a frappé fort avec une nouvelle forte hausse de ses taux directeurs pour tenter de la juguler, tout en assurant pouvoir éviter la récession. Le comité monétaire de la FED (FOMC) a relevé ses taux directeurs de trois quarts de point de pourcentage, comme s'y atten- daient les marchés. Ces taux se situent désormais entre 2,25% et 2,50%. «L'inflation est beaucoup trop élevée», a affirmé le patron de la FED Jerome Powell, reconnaissant que le dernier baromètre d'in- flation à 9,1% en juin, un nouveau record depuis plus de 40 ans, «était encore pire qu'attendu» par les membres de la FED. Il s'agit du quatrième relèvement consécutif : un quart de point en mars, un demi-point en L e gouvernement a maintenu sa prévi- sion de croissance de l'économie espa- gnole à 4,3% pour cette année, mais a réduit son estimation pour 2023 de huit dixièmes de point de pourcentage, à 2,7%, dans un contexte de forte incertitude due à l'impact de la guerre en Ukraine et à l'esca- lade des prix, notamment énergétiques. C'est ce qu'a annoncé la première vice- présidente du gouvernement et ministre de l'Économie et de la Transformation numé- rique, Nadia Calviño. Elle a déclaré que «tous les indicateurs continuent à confirmer une forte croissance de l'économie espagnole». Selon Calviño, ces nouvelles prévisions du gouvernement sont conformes aux esti- de croissance en 2022 à 4,3%

mations de toutes les organisations natio- nales et internationales qui, ces dernières semaines, ont revu à la baisse leurs projec- tions de croissance du PIB espagnol. ■

La FED frappe fort pour abattre l'inflation

mai, et trois quarts de point en juin - sa plus forte hausse depuis 1994. ■

B OURSE & F INANCES

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Point Bourse Hebdo

Evolution de l'indice Masi depuis Août 2021

Un parfum de vacances flotte à la Bourse de Casablanca ◆ Les salles de marché tendent à se vider, les opérateurs cédant à l'appel des congés estivaux, alors que la saison des résultats a à peine démarré. Récapitulatif.

de la semaine ont été l'œuvre de Stokvis Nord Afrique (+7,11%), Jet Contractors (+6,86%), Taqa Morocco (+6,50%), Stroc Industrie (+6,08%) et Eqdom (+5,66%). A l'opposé, les plus fortes baisses ont été accusées par Disty Technologies (-15,49%), Colorado (-8,69%), Fenie Brossette (-7,23%), Zellidja S.A (-6,85%) et IB Maroc.com (-5,86%). Sur le marché des taux, les taux pri- maires ont suivi cette semaine un mou- vement haussier impactant la tranche court terme de la courbe. Confortable dans ses finances, le Trésor a procédé, durant la semaine, à la souscription de 1,5 milliard de DH face à une demande faible depuis ces deux derniers mois. Résultats : la saison démarre au ralenti À la Bourse de Casablanca, la saison des publications démarre au petit trot,

avec notamment les semestriels de la première capitalisation. Maroc Telecom a réalisé un résultat net ajusté part du groupe d'environ 2,87 milliards de dirhams (MMDH) au premier semestre 2022, en amélioration de 1,7% à taux de change constant. Au terme des six premiers mois de 2022, le résultat opérationnel (EBITA) ajusté consolidé de Maroc Telecom s'est établi à 5,74 MMDH, en hausse de 3% (+3,3% à taux de change constant), indique le groupe dans un communiqué, précisant que la marge d'exploitation a atteint 32,7%, en hausse de 1,3 pt. Notons que l'astreinte imposée à Maroc Telecom par l'Agence nationale de réglementation des télécommunica- tions (ANRT), dans le cadre de la déci- sion du 17 janvier 2020 portant sur le dégroupage, est fixée à 2,45 milliards de dirhams. ◆

S i la plupart des opérateurs de marché profitent de leurs congés estivaux, le camp acheteur n'est pas le plus garni : à la suite d'une phase de rebond opérée début juillet, le Masi n’arrive pas à conserver ses positions et a réduit ses gains au fil des séances de cette semaine. C’est une semaine rapide à récapituler : il ne s'est pas passé grand-chose de mar- quant sur le marché, avec un Masi qui perd 1,39% et des volumes d’à peine 217 MDH sur le marché central. Des volumes faibles ont caractérisé cette baisse, ce qui trahit un manque d’ambition et d’in- térêt de la part des opérateurs, malgré des baisses importantes sur certaines grandes capitalisations. Côté valeurs, les meilleures performances Par Y. Seddik

Les taux pri- maires ont suivi cette semaine un mouvement haussier impactant la tranche court terme de la courbe.

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Marché secondaire des créances en souffrance

◆ Le besoin de la mise en place d’un marché secondaire des créances non performantes devient de plus en plus pressant au moment où la sinistralité gagne du terrain. Voici l'état d'avancement du projet. Où en est le projet mené par BAM ? D epuis quelques années, Bank Al-Maghrib a enclen- ché, avec les diffé- rentes parties pre- détérioration de l’environnement économique. les capacités des banques à financer l’économie. Par Y. Seddik

de travail inter-institutions a été mis en place sous l’impulsion de Bank Al-Maghrib et sous l’égide du secrétariat général du Gouvernement, comprenant les ministères de l’Économie et des Finances, de la Justice, de l’Industrie et du Commerce, le Conseil du pouvoir judiciaire et le ministère de l’Investissement, de la Convergence et de l’Éva- luation des politiques publiques.

Ce chantier porte en effet sur l’identification et la mise en place des conditions préalables pour la création de ce marché en vue de réduire le portefeuille des créances en souffrance porté par les banques à travers une cession auprès d’investisseurs intéressés. Ce faisant, ces ces- sions permettraient d’accroître

Interpelée sur ce sujet lors de la conférence de la présentation du rapport annuel sur la super- vision bancaire, Hiba Zahoui, directrice de la Supervision ban- caire auprès Bank Al-Maghrib, a annoncé que «le projet avance bien après une phase où il fallait mettre tout le monde autour de la table». D’ailleurs, un groupe

nantes, les travaux visant la mise en place d’un marché secon- daire des créances non-perfor- mantes, dont le besoin devient encore plus pressant avec la

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Ce comité a défini une feuille de route pour la réalisation des dif- férentes réformes courant 2022. Par ailleurs, l’étude menée à ce sujet avec l’assistance de la Société de financement interna- tionale (SFI) du groupe Banque mondiale a identifié un ensemble de prérequis d’ordre légal, fiscal et opérationnel qu’il est néces- saire d’adresser pour amorcer le démarrage de ce marché. Ils portent sur ce qui suit : • sur le plan légal, la suppression du consentement des débiteurs pour le transfert des créances litigieuses, la suppression de l’obligation de notification des débiteurs pour le transfert des créances non litigieuses; • les sujets fiscaux portent sur le régime à mettre en place pour accompagner le développe- ment de ce nouveau marché et son attractivité pour l’écosys- tème des investisseurs et des cédants; • sur le plan opérationnel, l’adaptation des systèmes d’in- formation des établissements de crédit pour permettre de dis- poser d’informations granulaires sur les portefeuilles éligibles à une cession. «Il y a un volet juridique dans lequel il faut lever certaines contraintes, notamment pour améliorer le recouvrement des créances (procédure judiciaire, notification des débiteurs…). Nous avons à cet effet un prestataire juridique qui nous accompagne dans la prépara- tion des amendements de la loi» , a déclaré H. Zahoui. Le deuxième volet est celui fis- cal. Pour la responsable de la DSB, ce marché, pour qu’il soit créé, a besoin d’aménagements fiscaux, que ce soit pour les investisseurs ou pour les ces- sionnaires. «Nous avons eu des discussions avec l’administra- tion fiscale qui ont auguré de bons résultats» , note-t-elle. Le troisième sujet est plus d’ordre opérationnel, avec la question de comment les banques doivent se préparer

pour les systèmes d’information, lesquels fournissent toute la donnée nécessaire permettant à un investisseur de comprendre et de valoriser le portefeuille, mais surtout de professionnali- ser et mettre à niveau le marché de recouvrement au Maroc. «Les deux premiers chan-

le portefeuille des créances en souffrance détenu par les banques de la place dépasse 87 milliards de DH. La hausse est de 3,1% par rapport à l’encours de janvier 2022, et de 5,7% par rapport à mai 2021. Le taux de sinistralité, quant à lui, approche les 9%. ◆

tiers, qui sont les plus priori- taires, avancent bien. En paral- lèle, nous travaillons avec les banques sur le volet opération- nel» , nous explique la directrice de la Supervision bancaire. Rappelons que selon les statis- tiques monétaires publiées par Bank Al-Maghrib à fin mai 2022,

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IT/ Matériel informatique

Des tendances de fond qui drivent la croissance du secteur I l ne se passe pas un mois sans que l’on entende parler de nouvelles ten- dances technologiques. IA, paiements électro- Quant au Maroc, il a connu une nette croissance de la demande sur les ordinateurs, tous secteurs confondus. Les principaux importateurs ont vu leurs ventes augmenter de 34,6% en 2021, soit un TCAM de 9,6% sur la période 2019- 2021. Par I. Seddik

◆ Les résultats du secteur technologique coté deviennent plus prévisibles et moins dépendants de l’activité économique. ◆ Les opérateurs IT cotés composent dans un contexte défavorable (inflation, tensions sur les chaînes d’approvisionnement,…)

en particulier le segment des matériels IT. Sans transition et du jour au lendemain, toutes les entreprises ont dû repen- ser leur quotidien et leurs acti- vités. Et le secteur techno- logique a fait montre d’une capacité particulière d'adap- tation lors de cette période. Les spécialistes des produits et solutions IT ont vu leurs ventes dopées grâce au confi- nement et au télétravail. Selon les statistiques du cabinet Canlays, 341 millions de PC ont été vendus en 2021 dans le monde, soit une augmen- tation de 14,6% par rapport à l’année 2020. Cette crois- sance est enregistrée malgré les nombreux défis logistiques et la pénurie mondiale des composants électroniques qui tend à s’estomper.

précisions sur le volet opéra- tionnel et financier). Plus en détail, le segment Volume (PC fixes et por- tables, produits d’impression et imagerie…) ressort avec un CA de 379 MDH au T2, en progression de 5,6%. La croissance sur ce segment s’explique principalement par la reprise des demandes et appels d’offres publics par rapport à l’année précédente. Le segment Value (stockage, serveur, réseau, sécurité…) a connu une progression moins importante de 1,6% au T2 pour finir sur un CA de 67 MDH. La croissance sur ce segment s’explique par la livraison de projets impor- tants initiés lors des précé- dents trimestres. De son côté, Disty, première PME à s’introduire sur le nouveau marché alternatif - dispensée de la publication des trimestriels -, s’attend à un premier semestre meilleur que celui de 2021. Lors de la conférence de presse sui- vant l’IPO, Younès El Himdy, PDG de la boîte, nous avait indiqué que «la croissance que nous constatons à fin juin 2022 est bien plus importante que l'an dernier en juin. Cela s'explique par une dynamique de la demande qui a continué à croître» . De manière plus générale, El Himdy a défendu une tendance haussière de la demande globale sur les nou-

niques, Big data, produits et solutions IT, digitalisation de l’économie…, sont en effet des tendances lourdes qui mobilisent de gros investis- sements dans toute l’écono- mie. Une dynamique qui n'est pas près de s’interrompre, même en cas de ralentisse- ment conjoncturel. D’autant que tous les secteurs sont aujourd’hui contraints d’inves- tir en technologie pour «sur- vivre» . Il faut dire que la crise sanitaire a été un véritable catalyseur du secteur technologique,

Puis survient la guerre en Ukraine avec son lot de conséquences inflationnistes qui ont laminé le pouvoir d’achat des ménages et donc freiné les ventes dans le seg- ment retail. Une crise qui a aussi créé des tensions en termes d’approvisionnement. D’ailleurs, dans sa commu- nication financière au titre du 2 ème trimestre, Disway note une baisse du pouvoir d’achat des ménages, com- binée au suréquipement pen- dant les années de pandémie, ayant conduit à une baisse importante des ventes sur le segment retail. En Bourse, le segment «matériel informatique» est représenté par deux princi- paux opérateurs : il s’agit de Disway et la toute nou- velle recrue Disty. Malgré les effets de la crise en Ukraine et les tensions sur les chaînes d'appro- visionnement, Disway fait état d’un chiffre d’affaires consolidé en croissance de 5,3% au 2 ème trimestre (en attendant les semes- triels qui donnent plus de

Avec des hypo- thèses conser- vatrices, le 1 er semestre 2022 chez Disty devrait enre- gistrer un CA en croissance d’environ 15%.

Les principaux importateurs maro- cains ont vu leurs ventes augmenter de 34,6% en 2021, soit un TCAM de 9,6% sur la période 2019-2021.

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velles technologies au Maroc avec une pente minimaliste autour de 7%. «Avec des hypothèses conser- vatrices et tenant compte des sai- sonnalités de vente, le 1 er semestre 2022 devrait enregistrer un CA en croissance d’environ 15% par rap- port au 1 er semestre 2021» peut-on lire dans la note d’information. Notons que le courtier Valoris Securities a souligné dans une note que «malgré le caractère exception- nel de la hausse des ventes entre 2020 et 2021 (effet Covid : confine- ment et télétravail), nous pensons que la société pourrait afficher un taux de croissance des ventes net- tement supérieur au rythme retenu par le business plan». Même lec- ture auprès des autres bureaux de recherche de la place. Pour BMCE Capital Global Research, Disty est un challenger qui a «le vent en poupe» . Selon

eux, dans les années à venir, l’opé- rateur devrait capitaliser sur une stratégie de développement bien rodée afin de profiter de l’ensemble des opportunités de développe- ment qu’offre la demande crois- sante de son marché actuel (une progression de 3% de la demande nationale selon le management), ainsi que conquérir de nouveaux segments à forte valeur ajoutée (visioconférence, cybersécurité, gaming, etc.). Introduite en pleine tempête bour- sière, Disty qui connaît actuel- lement une phase de volatilité à l’instar du marché, offre un niveau de rendement élevé (un D/Y de 5,3% contre 2,9% pour le marché en 2021). Avec une moyenne de payout attendu oscillant entre 52% et 66%, elle se positionne ainsi comme une valeur de rendement. Dès septembre 2022, les nouveaux

actionnaires devraient bénéficier du dividende au titre de l’exercice 2021. En plus du rendement, les fonda- mentaux de la société sont solides. Le chiffre d’affaires enregistre une croissance annuelle moyenne de 4,2%, passant ainsi de 420 MDH en 2019 à 456 MDH en 2021. En 2021, le résultat net s’élève à 18,3 MDH contre 5,7 MDH en 2020, soit une marge nette de 4,0% (vs. 1,4% en 2020). Il convient de souligner que parmi les points d’attention relevés par les bureaux de recherche, qui étaient unanimes à recommander de sous- crire à l’IPO de la tech, figurent les projections (conservatrices) en termes de croissance du chiffre d’affaires sur la période du busi- ness plan. Ces dernières tablent sur une moyenne de croissance des ventes de 25 MDH par an. Or,

l’entreprise a réalisé presque le double de cette croissance entre 2020 et 2021. Aussi, l'endettement, élément cen- tral pour les opérateurs dans ce secteur, a baissé (en moyenne annuelle) de 41,6% sur la période 2019- 2021 pour se situer à 56,4 MDH. Enfin, sur un autre volet, les analystes expliquent que les res- sources financières à disposition de Disty, devraient lui permettre d’améliorer son résultat financier sur le court & moyen terme (aug- mentation de capital de 62 MDH). Quoiqu’il en soit, que ce soit pour Disway, Disty ou pour les autres entreprises du secteur, les semes- triels seront l’occasion pour les investisseurs d’y voir plus clair sur les volets opérationnel et financier et d’apporter plus de précisions sur les perspectives de croissance à court / moyen terme. ◆

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L’Euro, une monnaie mort-née D epuis sa mise en circulation sous sa forme fiduciaire en 2002, l’Euro a toujours prétendu au statut d’alternative, ou du moins de concurrent direct au Par Rachid Achachi, chroniqueur, DG d'Arkhé Consulting

Dollar américain. Ancré dans une économie puissante, inno- vante et prospère, celle de l’Union euro- péenne, l’Euro avait en apparence toutes les chances de réussir, si ce n’est un cer- tain nombre d’obstacles infranchissables. Le premier étant l’absence d’unité poli- tique. Car oui, depuis des siècles et des siècles, la monnaie c’est César, autrement dit l’Etat. Le nom de «devise» renvoie lit- téralement à la devise d’un Etat et d’une nation. A savoir, les valeurs fondatrices et fédératrices de cette dernière. La pièce ou le billet de banque servait en quelque sorte de carte de visite étatique à l’international. On pouvait, juste en regardant un billet, savoir qui était le chef de l’Etat, la nature du système politique, les valeurs fonda- mentales du pays, le type d’architecture à travers les monuments représentés,… Dans le cas de l’Euro, tous ces éléments manquent à l’appel. Il n’existe ni Etat euro- péen, ni chef d’Etat par conséquent, ni valeurs séculaires, ni identité civilisation- nelle, sachant que tous les monuments représentés sur les billets d’Euro sont fic- tifs, bien que inspirés de monuments réels. Le deuxième obstacle est celui des dispa- rités de développement entre les différents Etats membres de l’UE. Avant la création de l’Euro, la plupart des pays du Sud recouraient de manière récurrente à des dévaluations monétaires pour gagner en compétitivité, face à une économie alle- mande imbattable sur le terrain de la com- pétitivité industrielle. L’Italie, mais aussi la France, bien que possédant un appareil productif puissant et moderne, ne pou- vaient rivaliser avec le voisin allemand qu’en recourant à ce levier. Cependant, la mise en place de la monnaie commune a été de fait une extension du Deutsche Mark qui ne dit pas son nom. Pour l’Allemagne, rien ne change, mais pour les pays périphériques, ils se sont retrouvés avec une monnaie surévaluée par rap- port à leur puissance économique, et sur

Avec la crise du Covid-19, la BCE a

décidé d’accélérer la dynamique de rachat des obligations d’Etat.

laquelle ils n’ont désormais aucune prise. Le régime de change de l’Euro est flottant, et les Banques centrales nationales sont devenues littéralement des succursales de la BCE dont le siège se trouve comme par hasard à Francfort, en Allemagne. Fini les dévaluations monétaires et place désor- mais à la lutte de tous contre tous à l’inté- rieur de l’arène européenne. Privés de dévaluation et de toute forme de protectionnisme, les économies euro- péennes du Sud vont se transformer gra- duellement en chasse-gardée de l’Alle- magne. Avant la crise du COVID, environ 80% des exportations allemandes se faisaient à l’intérieur de la zone Euro… Puis arrive la crise de 2008, suivie de celle des dettes souveraines de 2012. Les deux ayant des liens étroits, sachant que les solutions apportées à la première ont pro- voqué les malheurs de la deuxième. Petit rappel des faits. La crise de 2007- 2008 fut financière, puis économique. A l’époque, l’urgence était de recapitaliser le système bancaire en vue d'éviter sa faillite. Pour ce faire, les Banques centrales (FED et BCE en tête) décidèrent de recapitaliser les banques en injectant des centaines de milliards de dollars et d’euros dans le système financier, en rachetant à tour de bras tous les actifs pourris que détenaient les banques, et en abaissant les taux direc- teurs à zéro. Des politiques monétaires quantitatives qui ne peuvent à terme que déprécier la valeur de la monnaie (inflation

monétaire). Cette situation de surliquidité engendra de vastes mouvements spécu- latifs, autant sur les marchés des matières premières et alimentaires que sur ceux des dettes souveraines. Les dettes italiennes et grecques explosèrent et les taux d’intérêt devinrent insoutenables. Deux solutions s’imposaient d'elles- mêmes. Soit la Grèce et l’Italie quittent l’Euro et l’Union européenne, menaçant ainsi de faire éclater l’Union et de mettre à mort l’Euro, soit la BCE décide de sauver l’Euro à tout prix, quitte à sortir de son orthodoxie et soviétiser le marché de la dette. C’est la deuxième qui fut retenue avec la célèbre phrase prononcée en juillet 2012 par Mario Draghi, l’ancien président de la BCE : «Whintin our mandate, the ECB is ready to do whatever it takes to préserve the euro» / «Sous notre mandat, la BCE est prête à faire tout ce qu’il faudra pour préserver l’Euro». En septembre 2012, Draghi lance un plan illimité de rachat de dette de pays de la zone Euro, désormais incapables de se financer sur le marché en raison de l’envo- lée des taux. La monnaie n’est plus au service de l’économie, c’est désormais l’inverse. Et si je parle de soviétisation, c’est parce que la BCE a décidé que les taux ne seront plus formés par le marché, mais décrétés par la Banque centrale. Le but était, premièrement, d’éviter le défaut de paiement de la Grèce et de l’Italie, mais également de maintenir les

La mise en place de la monnaie com- mune a été une extension du Deutsche Mark qui ne dit pas son nom.

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spreads stables et bas entre les taux italiens et allemands. Cette opération de rachats de dettes a donné lieu à une création moné- taire colossale, avec là encore pour impact à long terme, une déprécia- tion de la valeur de l’Euro. Enfin, la crise du COVID-19 vient parachever cette fuite en avant monétaire. Pour éviter un effondre- ment de l’économie réelle et une envolée des taux sur les dettes sou- veraines, la BCE décide d’accélérer la dynamique de rachat des obliga- tions d’Etat, afin de permettre aux différents gouvernements de mettre en place des politiques de soutien aux entreprises et aux ménages, puis par la suite des politiques de relance. Ainsi, entre 2019 et 2020, le taux de croissance de la masse moné- taire est passé de 5 à 12%. Cette progression est la plus rapide et la plus importante depuis la création de l’Euro. Aux Etats-Unis, sur la même période, la masse monétaire a crû de 25% ! Croire que cela ne va pas à terme générer de l’inflation, voire de l’hy- perinflation, relève de la pure folie. D’autant plus qu’en face, les éco- nomies européennes sont sorties exsangues des différentes politiques de confinement. Une situation exa- cerbée par la désorganisation des chaînes d’approvisionnement à l’échelle mondiale et les surcoûts au niveau du transport de fret. Résultat des courses : une inflation rampante commence à s’installer en Europe, aux Etats-Unis, puis de plus en plus un peu partout dans le monde à partir de début 2021, avant d’être exacerbée à partir de février 2022 par le conflit en Ukraine, qui ne fut qu’un simple catalyseur. Mais contrairement à 2012, date à laquelle les dettes souveraines euro- péennes étaient déjà très élevées, en 2022 elles ont atteint des niveaux tout simplement insoutenables à terme. A titre d’exemple, la dette italienne est passée de 126% du PIB en 2012 à 150% en 2022. En France, elle est passée de 90 à environ 115% en 2022. Tout cela dans un contexte de réces- sion économique globale, d’une inflation totalement hors contrôle, d’une crise énergétique sans précé-

dent, d’un Euro qui dégringole face au Dollar (la parité est désormais atteinte pour la première fois en 20 ans) et d’une BCE confrontée à un choix cornélien : sauver l’Euro en rehaussant de manière importante les taux directeurs, au risque de pro- voquer une envolée des taux sur la dette italienne, ou sauver les dettes des pays du Sud en maintenant un

taux directeur bas et en achetant massivement des obligations d’Etat, au risque de perdre l’Euro, qui risque de casser la parité face au Dollar, et à s’effondrer littéralement. Un futur pas très lointain nous le dira Le problème est que comme rien n’est prévu dans les statuts pour per-

mettre à un Etat de sortir de l’Euro, le seul moyen d’y parvenir est de quitter l’UE. Voilà peut-être une occasion historique de repenser une nouvelle Europe, plus respectueuse de la sou- veraineté des Etats membres, plus autonome stratégiquement vis-à-vis des Etats-Unis, plus réaliste écono- miquement, et surtout plus démocra- tique. ◆

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